vendredi 22 novembre 2013

Il y a 100 ans Maurice Carlton

20 novembre 1913\2013 :  Commémoration du centenaire de la naissance d’un champion


Un modèle Guadeloupéen à transmettre aux générations futures

Maurice Carlton a milité dans de nombreuses amicales antillaises en Côte d’Ivoire. Il a toujours porté la Guadeloupe dans son coeur avec de courts passages sur son île natale dans une discrétion totale.

Le centenaire de Maurice Carlton est un vif rappel pour les jeunes générations en proie de doutes et aux difficultés du quotidien. 

Pour les sportifs, il a ouvert une voie dans laquelle les Guadeloupéens n’étaient pas attendus.

Au-delà du sport il a su se battre avec humilité, transmettre, construire loin de son île et se faire respecter en Afrique où il reste dans la conscience collective : Maitre Carlton.

Il y a 100 ans à Saint-Claude…

1910, la Guadeloupe compte 185 000 habitants, un territoire en plein essor mais traversée par des luttes politiques sur fond de tensions sociales et raciales.

L’état sanitaire de la Colonie est préoccupant, le taux de mortalité est important. Ce contexte incite une partie de la population à s’expatrier. Les premières vagues d’émigration s’orientent vers le Canada, le bassin caribéens et la France. A partir de 1904, la reprise du percement du Canal de Panama exerce une forte attraction d’ouvriers.

C’est dans ce contexte qu’émigre en France la famille Carlton. Le père occupe des fonctions d’employé des douanes à Marseille.

Marié à Tabar Octavie Adélaïde après le décès de leur premier enfant,il décide de la faire rentrer en Guadeloupe pour accoucher. Le 20 novembre 1913, nait à Saint-Claude un garçon. Il porte le nom d’Edmond Roger Maurice Carlton.

L’étudiant

Après 9 ans passés en Guadeloupe, la famille Carlton rejoint le père installé dans le Sud-Ouest. Il reçoit une éducation très rigoureuse. Les enfants de Troupes d’Autun, les éclaireurs de France, lui inculquent la discipline et l’ascèse physique.

Durant ses études secondaires à Bordeaux il apprend l’Allemand. Il entre au Prytanée la Flèche pour une éventuelle entrée à Saint-Cyr. Il prépare aussi le concours d’entrée à l’Ecole de la France d’Outre-Mer
sans succès.

Le sportif noir des années 30 : le Tolan Français !

En 1935, la Presse d’Aquitaine, L’athlète Moderne, remarque Carlton : le « Tolan Français ». Ce titre élogieux le compare au 1er champion olympique noir du 100 m, Eddie Tolan le vainqueur des jeux de Los Angeles (1932).

Carlton est un sprinter puissant. Il gagne en 1935 deux titres nationaux : un militaire et un universitaire. Il égale le record de France universitaire et devient le premier guadeloupéen champion de France universitaire.

Le premier Olympien guadeloupéen

Licencié au Bordeaux Etudiant Club (BEC), le 11 juillet 1936, il est vice champion de France sur 100 m., coiffé de justesse par Robert Paul.

Avec son club, il remporte le premier titre national d’une équipe de province sur 4x100 m. Ses succès lui offrent une sélection olympique.

Le 2 août 1936, à Berlin dans un contexte de propagande Nazie, Carlton court la 1ère série du 100m. Il termine 4ème et est aussi éliminé au relais 4x100 m.

Ces jeux, contre toute attente, légitiment la suprématie des athlètes noirs sur la discipline par les triomphes des noirs américains dans l’athlétisme : ils remportent 14 des 56 médailles olympiques de l’équipe des U.S.A.

Jesse Owens, rayonne à Berlin. Il remporte 4 médailles d’or (100 m, 200 m, longueur et 4 x 100m). Il naîtra entre les deux hommes une relation forte et durable.

L’exploit de Maurice Carlton qui devient le premier olympien guadeloupéen à peu d’écho en Guadeloupe. Bien qu’il soit retourné après les jeux marier sa cousine en Guadeloupe, il disparait de la mémoire collective guadeloupéenne.

En France, fidèle à son ancrage bordelais, il reste un provincial, un Béciste ! Malgré sa qualification olympique, la Guadeloupe ne le reconnait pas.


L’avocat, le grand père de l’athlétisme ivoirien

Suite à de nombreuses blessures Carlton met un terme à sa carrière en 1938. Avec une licence de droit en poche, il travaille à la préfecture de d’Orléans.

La guerre est déclarée. Chasseur Alpin, il est fait prisonnier par les Allemands. A sa libération, il fuit la France et rejoint ses parents à Dakar où son père est administrateur des colonies.

Il se prépare à la profession d’avocat et devient le collaborateur de Lamine Guèye. Il s’installe à Abidjan et participe à la création de la cour d’Appel.

Il se marie à René Dutil, une guadeloupéenne d’origine Marie-Galantaise. Il est décoré de la Légion d’Honneur et suite à son investissement ivoirien est fait Commandeur de l’Ordre National de Côte d’Ivoire.

Fidèle à sa passion de jeunesse, il s’investit dans l’athlétisme ivoirien, construit des pistes et organise des stages.

En 1962, atteint d’un glaucome il devient progressivement aveugle. Il meurt en 1990 à Paris.

Harry Mephon

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