jeudi 5 novembre 2009

Ces employeurs qui considèrent les ultramarins comme des étrangers

Un rapport de SOS Racisme et de la Fédération des maisons des potes sur le fichage ethno-racial montre que cette pratique discriminante est largement répandue dans l’Hexagone.
Pour la première fois, l’Etat, via la délégation interministérielle à l’Egalité des chances des Français d’outre-mer, a prêté main forte aux associations.
« Eurodisney et Nissan sont des entreprises qui considèrent que les Guyanais, Martiniquais, Réunionnais et Guadeloupéens ne sont pas des Français », indiquait, mercredi matin, Patrick Karam, délégué interministériel à l’Egalité des chances des Français d’outre-mer, en s’appuyant sur le rapport que Samuel Thomas, président de la fédération nationale des maisons des potes et vice-président de SOS racisme, venait de lui remettre.

Un rapport réalisé dans le cadre de la convention relative au fichage territorial ou ethnique pouvant conduire à des pratiques discriminatoires de recrutement dans les entreprises. Une loi de 1978 interdit le fichage ethno-racial et pourtant, ce rapport prouve qu’un certain nombre d’entreprises en quête de recrutement le pratiquent.
« L’arsenal judiciaire existe, avance Patrick Karam, ce qui manque c’est la volonté. »
Ainsi, un certain nombre de plaintes déposées par SOS racisme ont été classées sans suite, d’où pour MM. Karam et Thomas l’importance de ce rapport. Il y a eu toutefois deux condamnations effectives à l’encontre de la société Daytona en région parisienne et de l’OPAC de Saint-Etienne.

Dans le premier cas, la société avait publié une annonce d’embauche en exigeant du candidat une apparence « pur white », dans le deuxième cas, il s’agissait de discrimination raciale au logement opérée en raison de l’appartenance vraie ou supposée à une ethnie, avec un code de classification indécelable pour le non-initié… Logirep, une société d’HLM a été mise en examen en juin 2009 pour fichage ethnique des locataires et discrimination raciale. Non seulement, cet office HLM distinguait les locataires entre les catégories Afrique, Maghreb, DOM-TOM et Europe. Mais plus fort encore, les Réunionnais noirs étaient rangés dans une case Réunion pour le « pays du lieu de naissance », et les Réunionnais blancs dans la case « France ».

« What’s your ethnic origin ? »

Fort de ces jurisprudences, le délégué a pris rendez-vous avec Michèle Alliot-Marie, garde des Sceaux, et Brice Hortefeux, ministre de l’intérieur, pour que les policiers ou gendarmes prennent les plaintes et que les procureurs y donnent suite. Car, explique Samuel Thomas, « les autorités, tant la CNIL que l’inspection du travail et même la justice, sont peu enclines à sanctionner ces pratiques ».

Pourtant les exemples recensés par le rapport sont parlant.
Ainsi Nissan West Europe, sur sa page internet dédié au recrutement a mis en place une rubrique « Country » que le candidat doit renseigner. Dans ce champ figure une liste de pays, en dehors de la France. Parmi ceux-là on trouve la Guadeloupe, la Guyane, la Réunion et la Martinique… Le service des ressources humaines de Nissan va même plus loin puisqu’il demande aux candidats : « What’s your ethnic origin ? » Les réponses proposées sont, au choix : « African, Asian, Carribean, European, Latin, Middle East, Oriental, other… » Un comble quand on sait que le président de la HALDE, Louis Schweitzer était encore au mois de mai dernier le président du conseil d’administration de Renault, société qui a absorbé Nissan…

Autre exemple : le cabinet de recrutement Huxley demandait aux candidats de renseigner leurs origines ethniques. La CNIL, sollicitée sur ce sujet affirmait que « aucune donnée à caractère ethno-raciales n’est enregistrée sur cette base de données, ni collectée sur le site Internet » tout en ajoutant que la fenêtre permettant de collecter l’origine ethno-raciale des candidats n’était plus proposée… Pas à un paradoxe près, la CNIL a classé le dossier.

SOS Racisme et la délégation interministériel comptent sur ce rapport pour que la formule tolérance zéro ne soit pas une vaine parole. Mais surtout, pour Patrick Karam, ce rapport est la démonstration du danger des statistiques ethniques.

FXG, agence de presse GHM franceantilles.fr 04.11.2009

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L’affaire Eurodisney

En octobre 2008, une résidente de la Réunion, Marie-Lucie Génardière, résidente de la Réunion, mises en ligne sur le site consulte les offres d’emploi disponibles dans l’Hexagone, mises en ligne sur le site Internet de Disneyland Resort Paris à l’adresse disneylandparis-casting.com.
Elle constate alors que, dans la rubrique « postulez », puis « créez votre CV », le candidat doit indiquer obligatoirement son pays de résidence dans le champ marqué d’un astérisque.
Elle note alors que, résidente de la Réunion, elle doit non pas inscrire France mais Réunion. C’est ainsi qu’elle s’aperçoit que le site opère une distinction entre France et Guadeloupe, Polynésie française, Réunion, Guyane française, Nouvelle-Calédonie…
Or, une telle catégorisation est prohibée et réprimée par la loi qui sanctionne la constitution de fichier ethno-racial qui laisse craindre nécessairement une discrimination.
La distinction est d’autant plus choquante qu’elle que les autres régions françaises, comme la Corse, ne sont pas nommées.. Marie-Lucie Génardière s’émeut et écrit à SOS Racisme le 10 novembre 2008 : « Qu’est-ce que cela veut dire ? Les domiens sont-ils des étrangers ? » Elle ajoute : « Je suis très choquée et frustrée de cette sorte de classification. »
SOS Racisme se procure le bilan social de Disneyland Paris et découvre que ses salariés sont classés suivant des catégories déterminées en fonction de leur nationalité et notamment : « Afrique, hors Maghreb », « Afrique Maghreb », Autres Antilles », « Europe Ouest dont Français »…
Et il ressort que les salariés sont répartis par poste en fonction de leur nationalité ou, origine supposée. C’est dans ces conditions que SOS Racisme a obtenu le 19 octobre dernier une ordonnance du président du tribunal de grande instance de Meaux autorisant la saisie par un huissier de justice des fichiers des candidats.
La saisie a eu lieu mercredi matin… L'huissier a pu saisir le fichier du personnel, mais on lui a refusé le fichier des candidatures. Depuis, la page du site Internet de Disney « créez votre CV » n’était plus en ligne…
Selon nos confrères de France 3, la direction de DisneyLand Paris a jugé "cette campagne médiatique déplorable" quand "on connaît notre engagement en faveur de la diversité".
"Nous ne pratiquons aucune discrimination à l'embauche ou au quotidien", a précisé la direction, avant d'ajouter que "24% des salariés sont étrangers, dont 36% hors Union Européenne".

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La typologie raciale des hôtesses de l’air chez Air France

En 2008, la CFDT d’Air France alerte SOS Racisme sur des demandes particulières formulées par Air France auprès des hôtesses et stewards désireux de participer aux « vols spéciaux et manifestations exceptionnelles ». Le document n’est pas rempli par le demandeur, mais par un cadre qui renseigne sur les langues parlées, mais aussi sur la typologie raciale : « africain, antillais, asiatique, eurasien, indien, méditerranéen, occidental… » Une fois les champs du formulaire rempli, il reste une case à cocher selon que le personnel naviguant commercial accepte que ses données soient enregistrées avant qu’il ne signe une décharge. Or, selon l’association, rien ne permettait d’établir que le candidat savait que des données sur son origine étaient renseignées. Saisi par la délégation interministérielle de M. Karam, la CNIL n’a pas donné suite. Pour cause, c’est elle qui a autorisé Air France à procéder à ce fichage ethno-racial. SOS Racisme a saisi le parquet de Bobigny.

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