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jeudi 29 avril 2010
Saint-Marc : les déplacés du 12 janvier redoutent l’oubli
Port-au-Prince n’est pas la seule ville à faire face à la réalité des camps de déplacés. A Saint-Marc, dans le département de l’Artibonite, la plupart des personnes qui ont fui la capitale, ont été reçues dans des camps de fortune. Aussi ne sont-elles pas épargnées par la dure réalité des sites d’hébergement provisoire.
Contrairement aux Gonaïves où les déplacés ont été accueillis par des familles et des proches, dans la commune de Saint-Marc, ils sont logés dans des camps. Cinq centres d’hébergement ont été érigés pour la plupart au cœur même de la ville.
Les locataires de ces abris provisoires s’inquiètent de la faible présence des autorités de l’Etat et de la rareté de l’aide internationale. Une situation qui semble interpeller les gestionnaires et les déplacés logés au Centre d’hébergement provisoire de l’Hôtel Maguana. Ces locaux comptent 160 déplacés dont 50 mineurs et 12 enfants de moins de 2 ans.
En fait, la prise en charge des victimes et la gestion du Centre sont assurés par un ensemble de sept organisations de la société civile, basées pour la plupart à Frécyneau, quartier où se trouve le Centre. Et cette structure répond plus ou moins aux exigences de la vie quotidienne des déplacés, grâce au support financier de certains partenaires. Le Programme alimentaire mondial (PAM) distribue des rations alimentaires sur une base régulière.
Toutefois, ces derniers jours, les sinistrés ainsi que les gestionnaires constatent un certain ralentissement des efforts des bons samaritains à l’endroit des déplacés. Et Hutchenson Narcisse, membre du comité de gestion de dire que désormais « notre plus grand problème pour le moment est la gestion du quotidien ».
Cette précarité suscite des craintes chez les déplacés. Par exemple, Mme Eunide Belléus, 39 ans, mère de deux enfants, s’inquiète. Elle partage son abri avec sa famille et deux cousines. « Nous avons de sérieux doutes par rapport à ce qu’il va advenir de nous dans les prochains jours. Déjà, les responsables du Centre arrivent à peine à nous nourrir », lance-t-elle. Selon Mme Belléus, il faudrait une intervention d’urgence de l’Etat haïtien.
Cependant, l’état travaille d’arrache pied pour améliorer la qualité de vie des déplacés dont ceux de Saint-Marc, si l’on en croit la directrice départementale de la Protection civile (PC) de l’Artibonite, Gérarda Elizée. Même si « notre priorité est la préparation de la saison cyclonique, nous ne pouvons pas négliger les rescapés dans les centres d’hébergement, notamment à Saint-Marc » soutient-elle.
Soutien aux déplacés
Depuis le 12 janvier, différentes interventions ont été menées en vue de soulager les victimes du séisme réfugiées dans le département de l’Artibonite. Aussi, les autorités départementales, avec l’appui de différents acteurs de la communauté internationale, ont apporté un soutien important aux victimes, notamment dans les domaines de la santé, de l’éducation, de l’humanitaire et de la sécurité.
Au lendemain du tremblement de terre, l’accent a été mis sur les soins médicaux. Ainsi, avec le support de médecins venus de l’étranger, les responsables sanitaires du département ont procuré des soins à environ 4.476 personnes, du 12 janvier au 5 février 2010. Quelque 385 victimes ont bénéficié d’une intervention chirurgicale ou orthopédique avancée. Par ailleurs, pas moins de 40 personnes ont été amputées d’un membre, alors que 25 autres ont rendu l’âme dans les hôpitaux et centres de santé du département.
Désormais, «l’accent est mis sur un programme d’appui psychosocial aux victimes », souligne la directrice départementale de la Santé publique de l’Artibonite, Dieula Louissaint. Ce projet doit couvrir les 15 communes du département et s’étendre sur une durée de six mois.
Sur le plan éducatif, environ 32.000 élèves migrants ont été recensés dans le département, selon le responsable de la Direction départementale de l’Education de l’Artibonite, Josué Dolténus. Pour assurer la prise en charge de ces écoliers, la Direction départementale a établi 32 nouvelles salles de classe dans le département. Aux Gonaïves, 19 autres ont été mis sur pied dans les quatre lycées de la ville. « Notre plus grand souci maintenant est le paiement des nouveaux professeurs », s’inquiète, toutefois, M. Dolténus.
D’un autre côté, certains établissements scolaires privés ont reçu volontiers des écoliers. C’est le cas du collège La Ronde qui a accueilli une soixantaine d’écoliers. « Il s’agit d’un élan de solidarité en faveur de ces élèves et leurs parents », explique le directeur de l’institution, Louicius Mercius, avant de préciser : « nous avons encouragé les autres élèves de l’établissement à contribuer pour l’achat de matériels didactiques pour leurs nouveaux camarades ». Une contribution ne dépassant pas 50 % des frais scolaires est réclamée des parents de ces écoliers qui, pour la plupart, fréquentaient déjà La Ronde.
Des actions sont également entreprises dans le domaine des études supérieures. Aussi, les responsables de l’Université publique de l’Artibonite aux Gonaïves envisagent d’accueillir jusqu’à 300 étudiants déplacés. Mais ils déplorent le manque d’espace et de moyens financiers pour concrétiser cet engagement. « Si nous pouvions avoir au moins quelques tentes, cela nous faciliterait beaucoup la tâche », fait remarquer Pierre Poitevive, Doyen de la Faculté des sciences économiques et de gestion de l’UPAG.
En ce qui concerne la nourriture, le Programme alimentaire mondial (PAM) a distribué plus de 1.505.926 tonnes métriques de vivres dans les 15 communes du département. Au total, 172.605 personnes en ont bénéficié. Dans les cantines scolaires supportées par le PAM, 110.400 élèves ont reçu de l’assistance. Une quantité de 692.419 tonnes métriques de nourriture ont été distribuées dans le cadre de ce programme.
Par ailleurs, plusieurs autres Organisations non gouvernementales (ONG) œuvrant dans le département ont apporté leur soutien aux populations en matière d’aide humanitaire. « Cette période de crise nous a offert l’occasion d’affermir nos relations avec les acteurs de la communauté internationale et de mieux structurer les comités de la Protection civile dans les 15 communes du département », déclare Mme Elizée, exprimant sa satisfaction quant au soutien des différents acteurs aux populations de l’Artibonite, après le séisme.
Sur le plan sécuritaire, des efforts ont été consentis pour stabiliser la situation en dépit de quelques cas isolés d’actes de violence enregistrés. Ce qui a permis d’appréhender, dans le departement, 29 évadés de prison.
L’Artibonite a été l’un des départements à recevoir le plus de déplacés après le séisme du 12 janvier. Environ 200.000 personnes y auraient ainsi cherché refuge. Les communes qui ont reçu le plus de rescapés sont Gonaïves et Saint-Marc, avec respectivement 60.686 et 26.708 personnes.
Rédaction : Jean Etiome Dorcent
Edition : Hugo Merveille
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