jeudi 18 novembre 2010

Le Nouvelliste en Haiti - L'effet papillon

Le Nouvelliste en Haiti - L'effet papillon: "L'effet papillon

Haïti: Deux morts et plus d'une vingtaine de blessés. C'est le bilan d'une journée mouvementée au Cap-Haïtien, la deuxième ville du pays et à Hinche. Les dépôts d'une importante ONG ont été pillés, des postes de police incendiés, des routes coupées.
La ville du Cap s'apprête à dormir d'un oeil. Des renforts de la Minustah et de la PNH sont arrivés sur place et des tirs sporadiques trouent le silence, rapporte notre correspondant sur place au moment pour Le Nouvelliste de mettre sous presse.
Il est trop tôt pour tout comprendre de ce mouvement. Est-ce une étincelle qui a mis le feu aux hostilités ? Est-ce comme le dit la Minustah « une motivation politique, visant à créer un climat d'insécurité à la veille des élections » qui excite les passions ?
On peut cependant en tracer les grandes lignes. Le Cap n'est pas le chouchou du gouvernement en place. La ville vit de ses restes, plongée dans la nostalgie de son passé. Entre l'argent de ses fils émigrés et les trafics divers, la deuxième ville du pays fait du commerce et de l'agriculture. Aucun bassin important d'emplois ni dans le privé ni dans le public n'assure un revenu régulier aux actifs de la ville. Le secteur touristique y est encore un mirage que le site de Labady entretient. Le Cap n'est pas heureux et insouciant.
Depuis des mois, un torchon y brûle avec la Minustah suite à la mort d'un agent civil de la mission de l'ONU. Des tergiversations autour de l'enquête qui ne peut encore fixer les responsabilités, entravée entre vices de procédure et immunité diplomatique pour le personnel et les bâtiments de la mission, créent un climat de méfiance entre les Capois et la Minustah.
La ville héberge aussi un contingent népalais. En ces temps de choléra, Minustah plus Népalais cela fait un cocktail peu ragoûtant.
Pour corser le tout, les tensions politiques y sont latentes. Le candidat du parti au pouvoir y est en délicatesse dans les sondages. Les barons du régime se chamaillent, rapporte-on. Dans une ville, le Cap, réputée aimer passionnément ou pas du tout, cette période électorale met les tensions à vif.
Entre-temps, le choléra tue au Cap. Des dépêches d'agence rapportent que la ville a peur. La peur ne fait jamais bon ménage avec les insatisfactions diverses de la vie quotidienne. D'autant que la frontière avec la République Dominicaine n'est plus aussi ouverte depuis que l'épidémie sévit. Les trafics alimentent le commerce et le reste. Quand ils ralentissent, tous les nerfs s'échauffent vite.
Il était à craindre que la moindre goutte d'huile jetée sur ce feu sans flammes qu'est le Cap et embrase la ville. C'est ce qui s'est produit ces dernières 48 heures.
Acte d'un pyromane, d'un apprenti sorcier qui joue avec le feu ou d'un pêcheur en feux doux ?
Et maintenant qu'il y a mort d'hommes, trop tard pour chercher à le savoir. Il est à craindre que dans la tradition haïtienne d'autres villes s'approprient la cause des fils d'Henri 1er .
L'effet papillon.
Le Cap amorce une bombe K pour la Minustah qui y affronte la première vaste fronde de ses multiples mandats en Haïti. La tension en province fait du choléra une bombe K qui peut, avec l'inattention induite par les heurs violents, faire son oeuvre de mort dans une relative indifférence dans les prochains jours.
Bombe K aussi pour les élections si cela chauffe au Cap-Haïtien, chef-lieu d'un département clé sur la route du pouvoir.
La bombe K. K comme Cap-Haïtien. K comme chaos. K comme choléra. K comme Minustah nan ka.




Frantz Duval
duval@lenouvelliste.com

– Envoyé à l'aide de la barre d'outils Google"

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