vendredi 10 février 2012

LE COMMERCE DE LA SOTTISE ET DE LA HONTE


Il n’était peut-être pas nécessaire de répondre à une provocation stupide, faite dans le but de bien faire du battage, selon des visées électoralistes qui ne font de doute pour personne. Ceci, selon l’adage, “que ce soit en bien où en mal, mais pourvu que l’on parle de moi”, cher à ceux qui se trouvent en quête de promotion, que ce soit pour eux-mêmes, ou pour leur clan.

Cependant, nous ne pouvons ignorer la redoutable malfaisance de la méthode utilisée, et comprendre les mécanismes sur lesquels elle s’appuie, c’est bien prendre toute la mesure de la situation dans laquelle nous nous trouvons, afin de ne pas trop nous bercer d’illusions quant à ce qui demeure encore “possible”, dans une société moralement effondrée comme la nôtre.

Soyons clairs. Ce ministre, dont nous prenons un légitime plaisir compensatoire, et je le confesse, moi le premier, à attribuer ses dérapages récurrents à la faiblesse de son esprit, est malheureusement tout le contraire de cela, un homme à l’intelligence vive et machiavélique, tout au service d’une seule chose. Il ne s’agit même pas de son clan, pour lequel il se bat ainsi car si certains de ce clan envisageaient de lui faire ombrage, il n’hésiterait pas à les broyer. Non, cet homme n’est motivé que par une seule chose, l’exercice effectif, exclusif, et jouissif, du “pouvoir”, du vrai. Il ne s’agit donc pas de ce pouvoir des marionnettes médiatiques, auxquelles on confie le rôle de séduire le peuple, pour que celui-ci se dépossède du sien, afin de le céder sans la moindre résistance et avec le sourire, à ceux qui pourront le contraindre, mais du vrai pouvoir, celui de ceux qui depuis la coulisse, tirent les ficelles, dans un anonymat qui décuple la volupté perverse qu’ils éprouvent, se grisant ainsi de tromper, et de manipuler.Il est peu probable que, même s’il se montre imbu de sa personne et volontiers méprisant des autres, cet homme soit profondément convaincu de ce qu’il raconte, et il n’a d’ailleurs dans sa position sociale, nul “besoin” d’avoir de telles convictions, qui n’ont lieu d’encombrer la cervelle que d’hommes en quête d’un faire valoir, ce qui ne hante pas celui-là. Et nous ferions une erreur totale de croire que tout ce racisme obscène et tapageur, contre les immigrés, relève d’une volonté de s’en prendre précisément à ceux-ci, parce que tels. Car, ces immigrés qui ne sont pas de son monde, ne constituent absolument en rien, un dérangement pour ce ministre qui ne les côtoie pas, ce qui n’est pas le cas de ceux dont la fréquentation quotidienne de ces immigrés, leur rappelle la condition qui est la leur, c’est à dire celle de classes populaires “défavorisées”. C’est donc en direction de celles-ci qu’alors il discourt, mais il est certain que dans le fond, des personnes mêmes de ces immigrés dont il ignore tout, ce ministre s’en moque éperdument.

Rappelons à ce sujet qu’il fut est un des inspirateurs de ce projet très ambitieux, “d’Union de la Méditerranée”, si rapidement avorté, tant desservi qu’il fut, par le manque total de crédibilité de celui qui fut chargé de l’incarner, en reprenant ce projet à son compte. Ceci montre que cet homme peut bien s’accommoder n’importe qui, dès lors que cela l’arrange, quand cela l’arrange.

Non, les immigrés dans cette affaire ne sont une fois de plus, que les instruments, d’une conquête du pouvoir, que les leaders politiques, qu’ils soient de gauche ou de droite, ont sans la moindre honte, le vice d’utiliser aux alentours de chaque consultation électorale. C’est ainsi que les uns, proposent un droit de vote pour les immigrés, lesquels quant à eux, n’ont strictement jamais rien demandé de tel, et s’en moquent d’ailleurs complètement. Ceci, sans que ces leaders politiques faisant ainsi montre de “modernité”, ne courent le risque d’être pris à contrepied, face à leur propre électorat, en voyant cette disposition constitutionnelle effectivement adoptée. Car, compte tenu que pour une modification constitutionnelle, la majorité nécessaire est des deux tiers du parlement, c’est à dire assemblée et sénat rassemblés en congrès à Versailles, celle-ci ne risque pas d’être jamais atteinte sur un tel sujet. C’est alors que les autres s’empressent de s’offusquer vivement de cette dévalorisation du droit exclusif des nationaux, et de refuser bruyamment cette idée au nom de l’identité nationale menacée. Et tout cela, en feignant de croire qu’il s’agit par là, d’une manœuvre souterraine des immigrés, pour arracher des droits qui ne sont pas les leurs.

Il est remarquable à ce sujet que les uns et les autres parlent des immigrés, mais que ni les uns ni les autres ne parlent aux immigrés, qui ne représentent pour les uns, qu’une part de la célèbre “misère du monde”, qu’il convient par générosité, d’accepter de prendre en charge, et pour les autres, une contagion de délinquance, dont il importe de mettre la nation à l’abri.

Les immigrés ne sont donc que l’arbre qui cache la forêt des affrontement nationaux, et ce ministre dans son discours, n’est pas dans le rôle d’un militant qui cherche à convaincre du bien fondé de ses propositions, mais dans celui d’un peu reluisant prestataire de service, proposant à sa clientèle qui en fait la demande, des discours de dénigrement et d’exclusion.

En fait, ces discours ont une double fonction. Tout d’abord offrir à la clientèle un objet de détestation, une victime expiatoire qui sera sacrifiée, après avoir été chargée de tous les maux de la société. Ceci, afin que le peuple puisse se soulager en exprimant sa vindicte, contre un objet sur lequel il “peut”, étant bien entendu qu’en réalité il ne peut strictement rien, contre les vraies causes, et les vrais fauteurs de son trouble.

L’autre entreprise à l’efficacité plus incertaine, consiste, à l’heure même où les signes grimaçants, révélateurs de la “décadence”, manifestent de plus en plus fortement leurs injures, de tenter d’obtenir un sursaut de la part d’un peuple humilié, en prétendant un caractère quasi biologique, aux heures fastes de son passé, lui garantissant la constance de sa “capacité”.

C’est donc dans cette volonté de conjurer la débâcle, en invoquant le génie nominal et irréductible de la race, devant permettre de surmonter l’épreuve, pourvu bien sûr, que cette race demeure “sauve”, qu’intervient la phrase :

“ Toutes les civilisations ne se valent pas...”

Il est clair que cette formule tendait à montrer du doigt des éléments exogènes, issus de sociétés différentes réputées moins évoluées, et dont la présence dommageable desquelles, entrainait une dévalorisation corrélative de notre société. Il ne s’agit donc telle que formulée, de rien d’autre que de la manifestation d’un pur et détestable “racisme”. Car, quant à la diversité des options sociétales retenues dans les différentes communautés humaines, et même si cette question ne pouvait manquer d’être l’occasion elle aussi, de rudes controverses, c’est très certainement d’une toute autre façon qu’aurait été accueillie une formule peu différente telle que :

“ Toutes les civilisations n’emportent pas les mêmes valeurs...”

Dès lors, il était simple et possible partant de là, d’exiger des nouveaux arrivants qu’ils se conforment aux us et coutumes de leur nouvelle villégiature, puisque leur inadéquation comportementale du départ, ne traduisait pas une incapacité biologique d’accéder à ceux-ci. Or, c’est bel et bien un caractère “inassimilable”, que la première formule tend à établir, en laissant entendre que des races supérieures ont établi des civilisation de haute valeur, que des races inférieures ont établi des civilisation de niveau inférieur, qu’il existe donc une inégalité entre les différentes civilisations qui dès lors, ne peut avoir de raison que par rapport à une inégalité des races, rendant inassimilables les coutumes des unes, par les autres, et justifiant le rejet de ceux dont l’intégration ne peut se faire, pour des raisons biologiques liées à leur race.

Ne soyons pas dupes, cette attaque contre les immigrés n’est pas le véritable but de la manœuvre, et tout le monde se dépêchera de les oublier, dès le lendemain de l’élection. Non, il s’agit bel et bien d’une attaque par un des siens, contre le peuple français lui-même, qu’il entend asservir, par une instrumentalisation des ses angoisses et de ses faiblesses, comme d’autres s’emploient à tendre la bouteille à un alcoolique, pour pouvoir le manipuler.

En réalité, cet homme qui, il faut le reconnaitre, se fait une idée de ce que devrait être la France, ne l’aime pas, telle qu’elle est devenue, c’est à dire dans sa faiblesse actuelle, et il en fait indirectement le reproche aux Français eux-mêmes. Ceci, d’une façon très habile, puisqu’il s’agit pour commencer, d’un reproche que ceux-ci, contraints par un sentiment contradictoire, ne pourrons réfuter, celui de s’être laissé envahir par des hordes allogènes.

Ainsi, la dénonciation de faiblesse coupable, qui est bien ce que cet homme reproche aux Français, passe-t-elle parce que pour l’instant, il leur en fourni un début d’excuse. Et ceci, en attendant qu’une fois que ces Français auront admis son autorité sur eux, il leur reprochera plus directement leur manque d’ardeur et de sacrifice face à la difficulté qu’affronte le pays, et là, les choses prendront un tout autre tournant...

Il y a des hommes pour lesquels une forme d’amour pour la nation, en fait le plus grand des dangers pour celle-ci. Ainsi, lorsque apprenant du fond de son lit d’hôpital, la capitulation des forces allemandes après tant d’années de sacrifices, pendant lesquelles il avait lui-même payé de sa personne, Adolf Hitler, fou de douleur et de rage, en a d’abord et avant tout voulu, aux Allemands, qu’il rendait responsables de ce désastre. Il n’admettait pas en effet, que ce peuple qui n’avait pas vu un seul mètre carré de son territoire envahi par l’ennemi, ait pu déposer les armes, et refuser le sacrifice, au niveau incroyable et inhumain, qui fut celui de ceux d’en face, pourtant bien moins nombreux et moins bien équipés, sacrifice qui leur a valu la victoire.

Hitler aimait l’Allemagne, comme on aime sa mère, mais pas les Allemands, auxquels il ne pardonnait pas d’avoir subi par lâcheté selon lui, une défaite dont l’humiliation fut décuplée par les clauses absolument dramatiques pour l’Allemagne, du traité de Versailles. Dès lors, il n’hésitera pas à leur infliger les pires épreuves afin de leur rachat, pour réparer cette offense faite à sa chère et vénérée patrie, par des fils indignes d’elle, et de les infliger par cela même, à toutes les autres nations.

Là également, la rage raciste avait pour objet de rassurer la nation quant à elle même, en la faisant nominalement supérieure aux autres par sa race, et de nier la réalité de la cause du désastre. Ainsi la grande Allemagne n’avait pas été battue à la régulière, par des hommes déterminé à chasser l’envahisseur, mais par la traitrise de certains d’autres races en son sein. La faiblesse étant ainsi un signe d’impureté, Hitler préférera voir ses compatriotes morts, plutôt que faibles, et on sait ce qu’il en advint, huit millions des siens périrent par son délire.

Pour l'instant, il est clair que les Français ne mesurent pas, à quel point la délectation raciste à laquelle s’adonnent sans plus de honte, nombre de leurs représentants, pourrait avoir pour eux des conséquences dévastatrices, puisque tout cela n’est dirigé que contre les autres. Ils manquent ainsi de remarquer que quelques mois seulement avant que la griffe nazie ne s’abatte sur l’Allemagne, l’immense majorité des Allemands les ayant plusieurs fois recalés à différentes élections, se trouvait en opposition avec Hitler et les siens. Les Allemands les ont donc laissé faire, faisant confiance à leur démocratie. Nous connaissons la suite...
Toute la force des dictateurs, et des intrigants comme ce ministre, c’est d’avoir compris les nécessités “affectives” du fait social et national. Les peuples ont en effet besoin avant tout de s’aimer, et quant ils se voient “laids” dans le miroir intraitable des événements, il faut absolument que quelqu’un vienne les rassurer et leur dire qu’ils sont “beaux”, aimables, ces compliments devenant convaincants, s’ils sont censés relever d’une nature supérieure.

La situation actuelle si délicate et si tendue de ce pays de France, est bien sûr classique d’un début d’aventure dramatique. Les données idéologiques de celle-ci furent ainsi posées, mais il y eut un loupé imprévu...

En effet, toute cette campagne de dénigrement raciste était censé viser les immigrés, ceux qu’on peut balancer par dessus bord à tout moment, et dont on peut s’en aller bombarder leurs pays d’origine, et les jeunes fragilisés issus de l’immigration, ceux qu’on peut à tout moment envoyer en prison, pour les tenir encore durablement à l’écart du jeu démocratique, puisque n’étant pas assimilable à la race supérieure, ils risquaient de troubler la fête.

Mais ce ne furent pas ceux-là qui ont réagi face à l’infamie, mais ceux qui par l’histoire et par leur sacrifice, rappelé avec tant d’éclat par leurs intellectuels, ont acquis un ascendant moral définitif, sur les descendants de ceux qui ont martyrisé leurs pères, dans une des pires tragédies de l’Histoire.

C’est donc un descendant d’esclave, qui se verra alors soutenu par beaucoup des siens, qui va se dresser pour former l’opposition, à la gangrène raciste. Et maintenant, le jeu va devenir délicat, pour que toute cette république mensongère, ne se retrouve pas totalement déshabillée, infligeant au regard de tous sa laideur jusqu’alors camouflées, par toutes ses proclamations quant à elle-même. Car il est peu probable qu’après une telle mise à nu de sa cruauté, ce peuple puisse encore espérer se voir beau dans le miroir des autres...

Les Antillais sont en effet dans la situation où, leur appréciation, ou leur dénonciation, fera de ce pays aux yeux des autres nations, soit une république apaisée et tolérante, ayant dépassé la question raciale, soit le pays du triomphe de l’intolérance raciste. Et si leur voix compte de par le monde, c’est parce qu’il s’agit d’un peuple “rédempteur”, et en ce sens inattaquable, parce qu’à ce jour, il n’a rendu que le bien, à la nation qui lui a fait tant de mal.
Nous verrons la tournure que prendront les événements, mais pour être complet, il est temps de démonter cette sottise grotesque de hiérarchisation des civilisations.

Ce que nous appelons une valeur, est une donnée “relationnelle” établie entre un objet, et ce qu’il concerne. Et si c’est le terme “relationnel ”, qui est retenu ici, plutôt que “relatif”, c’est pour signifier que cette “valeur” ne résulte pas d’un simple positionnement de cet objet par rapport à un autre, mais de “l’appréciation” de celui-ci, par cet autre.

Ainsi, un verre d’eau n’a-t-il pas la même valeur à Paris, et en plein milieu du Sahara, alors même qu’il s’agit bel et bien du même verre d’eau.

D’une façon fondamentale, il n’existe donc pour nul objet, de valeur “absolue”, qui serait donc une valeur strictement “objective”, détachée de “l’arbitraire” de celui qui l’apprécie, pour pouvoir établir ainsi une hiérarchie absolue des valeur attribuées aux choses. Et ceci, précisément parce qu’il ne peut y avoir de valeur des choses, “qu’attribuées”.

Il faut dès cet instant mesurer l’étendue de la sottise de ceux qui pensent possible d’établir une hiérarchie de la valeur des civilisations...

En fait, une civilisation ne peut avoir de valeur, que par rapport aux gens qu’elle concerne, et uniquement par rapport à ceux-là. Elle peut d’ailleurs avoir parmi la diversité de ces gens, des valeurs différentes ce qui rend encore plus fragile cette notion de valeur. Compte tenu que son objet premier c’est de permettre le “bien-être”, en poursuivant le “mieux-être”, elle vaudra plus ou moins, selon qu’elle apportera plus ou moins de satisfaction aux gens, selon leur attente, et selon leur projet.

Toute la sottise des racistes occidentaux, totalement enflés de la crânerie qui constitue un des principaux produits de consommation de cette société, c’est de prétendre que toute la diversité des peuples de notre humanité avait le même projet, c’est à dire de vivre comme eux, et que, dans le fait qu’ils y sont parvenus et pas les autres, se trouve ainsi la preuve de leur supériorité.

Mais, ce n’est pas vrai que tous les peuples ont caressé le rêve lointain de pousser son caddie le samedi après-midi dans un supermarché, pour s’installer ensuite le soir devant une télévision, pour écouter un “newseux“ à prompteur, déblatérer les salades sur commande faites par le pouvoir politique...Il y a bien des hommes qui ont rêvé d’autre chose...

Les Tahitiens vivaient heureux et sans histoire sur leur île autour de leur chef, dans une civilisation qui avait alors pour eux, beaucoup de valeur, et surtout beaucoup plus, que celle du “bordel colonial” qu’en ont fait actuellement les Français. Et il ne suffira pas de dire que, puisque les Tahitiens ont désormais la télévision, pour se défaire la cervelle, et de l’alcool pour se défaire les boyaux, qu’il s’agit en leur société actuelle, occidentalisée, d’une société supérieure à celle de leurs vaillants ancêtres...

Disons donc encore une fois, qu’une civilisation ne peut avoir de valeur que pour ceux qu’elle concerne, et bien sûr pas, pour ceux qu’elle ne concerne pas, de telle sorte qu’il n’existe aucun repère universel, permettant d’étalonner les différentes civilisations, et d’en établir ensuite un classement. Tout cela ne signifie rien du tout...

La prétention occidentale repose sur le constat que pendant quelques temps, et ce n’est déjà plus vrai, les occidentaux semblaient être ceux qui étaient parvenus à la plus grande maitrise, sur les choses matérielles. Cependant, si nous voulons selon ce rapport d’efficacité, établir malgré tout une comparaison entre civilisation, nous admettrons que dans sa concurrence à une autre, la civilisation supérieure à l’autre, sera celle qui lui survivra.
Ainsi, se donner les moyens de sa pérennité, constituerait-il l’acte le plus déterminant, permettant d’établir une éventuelle hiérarchie des civilisations. Or, le mode de vie occidental, n’ayant pas permis de maintenir le simple désir des gens d’avoir des enfants, nous savons déjà toutes ces sociétés occidentales, condamnées à disparaitre du fait de leur dénatalité...

Disparaitre sous le coup d’un ennemi imprévu, où suite à un désastre naturel, ne met pas forcément en cause la pertinence des éléments sociétaux d’une civilisation. Mais disparaitre tout connement d’un manque de faire des enfants, plus nul que cela, on ne peut pas faire...


Paris, le 10 février 2012
Richard Pulvar

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