Lorsque faisant suite à la dépêche d’Ems rédigée par Bismarck comme devant être selon ses propres dires, un “chiffon rouge agité devant le taureau gaulois”, et jugée justement injurieuse pour la France, Adolf Thiers lançais aux députés courroucés partisans de la guerre, “ vous n’êtes pas prêts”, Edmond le Bœuf, maréchal de France et ministre de la guerre lui rétorqua : “ Nous sommes prêts et archiprêts...il ne nous manque pas un bouton de guêtre ”.
La suite on la connait, ayant très gravement sous estimé la puissance prussienne, et déclarant certaine d’elle, la guerre à la Prusse, la France mobilisa 380 000 hommes auxquels Bismarck opposa tout de suite, une armée de 900 000 hommes.
Le sort en était jeté dès le départ, et ce qu’absolument aucun de ceux qui voulurent rageusement cette guerre n’avaient prévu, se produisit, et six semaines seulement suffiront pour que l’orgueilleuse armée française subisse une de ses plus humiliantes défaites.
Lorsque certaine de sa toute puissance, l’Allemagne déclare la guerre à la France le premier août 1914, Von Molkte, le chef d’état major de l’armée allemande, ne doutait pas une seule seconde que, profitant du viol de la neutralité de la Belgique pour attaquer la France, dans une région où le respect de cette neutralité imposait à cette dernière de ne pas y stationner de troupes, il parviendrait par cette manœuvre d’encerclement à anéantir cette armée française, en guère plus de six semaines.
La suite on la connait, c’est sous l’accusation d’avoir été responsable de cette guerre, qu’après sa défaite, l’Allemagne aura à supporter les sanctions accablantes et humiliantes du traité de Versailles.
Lorsque le 22 juin 1941, Adolf Hitler déclencha l’invasion de l’Union Soviétique, sous le nom “d’opération Barbarossa”, avec l’effectif absolument ahurissant de 4 millions d’hommes, deux fois plus que les Russes ne leur opposaient à l’époque, et 600 000 véhicules, contre une armée décapitée par les purges staliniennes, moins équipée, moins entrainée, et moins bien dirigée, lui et son état major ne se donnent que quatre mois pour régler l’affaire, et s’assurer du contrôle de la Russie.
La suite on la connait, c’est devant Stalingrad, au cours d’une bataille titanesque pour laquelle l’Armée rouge devra consentir un sacrifice humain terrifiant, que le rêve nazi va s’écrouler...
Ce qu’il nous faut remarquer tout d’abord, c’est qu’aucun de ces conflits ne s’est déroulé comme, ni les unes, ni les autres, des parties, ne l’auraient imaginé auparavant. Il s’agit en fait tout le temps, lors de la prise de décision d’entrer dans de telles guerres, celles d’une géopolitique compliquée comme celle qu’on nous propose aujourd’hui, forcément d’un grand saut dans l’inconnu. Et, ce ne sont certainement pas les Américains, se vivant volontiers comme étant invincibles et qui, après leurs cuisantes déconvenues du Viet Nam, de l’Irak, et de l’Afghanistan, diront le contraire.
D’autre part, tous ceux qui ont déclaré la guerre depuis ces cent cinquante ans, l’ont fait après avoir très maladroitement sous-estimé la capacité de résistance de l’adversaire, mais il nous faut surtout bien remarquer qu’ils ont tous perdu les guerres qu’ils avaient eux-mêmes provoquées.
Ainsi, avant de tenter de nouvelles aventures, serait-il prudent de considérer dans leur constance, ces faits historiques...
Ce sont ces constats qui rendent totalement insupportables les discours de tous les propagandistes bellicistes d’aujourd’hui, qui officient dans les différents médias, ces gens pour lesquels, indépendamment même de savoir si le droit, la justice, la morale et la politique, justifient une intervention militaire en Syrie, ce qui est loin d’être le cas, tout serait déjà très simplement joué d’avance, et pour lesquels il n’y a donc plus qu’à y aller.
Ils ne doutent pas que tout va se passer comme ils le souhaitent et prétendent avoir prévu, alors que justement rien dans de telles affaires n’est prévisible, ils ne doutent pas que tout soit prêt, jusqu’aux boutons de guêtres, et que le résultat sera forcément tout bénéfice pour les agresseurs.
Quant à l’idée que cette affaire pourrait se transformer pour nous en une effroyable catastrophe, et même en une tragédie totale pour toute notre humanité, elle ne les habite pas une seule seconde. Or, parce que ces gens ne doutent de rien, ils sont terriblement dangereux.
Soyons clairs.
Qui peut dire comment va se passer l’aventure guerrière dans laquelle certains veulent absolument nous entrainer, alors même que nul ennemi ne nous agresse, ni ne nous menace ?
Personne ne le peut, bien trop d’éléments d’appréciation quant à ce que seront les réactions des différentes nations, particulièrement la Russie, la Chine, l'Iran, et l'Egypte, nous manquent.
Qui peut garantir que compte tenu de la grande complexité géopolitique de cette région qui concentre des “intérêts vitaux” pour les nations qui sont justement les plus puissamment armées du monde, et par le fait, leurs rivalités, elle ne se transformera pas en un cataclysme planétaire ?
Personne, absolument personne ne peut avoir la moindre assurance à ce sujet.
Dès lors, qui a le droit de nous engager avec une telle facilité dans une telle aventure, sans aucun but de guerre bien défini, aussi incertaine et lourde de menaces insupportables, pour nous et pour tout le reste de notre humanité ?
Personne n’a ce droit, et celui qui se l’octroie, doit être écarté des décisions, par son peuple vigilant...
Paris, le 7 août 2013
Richard Pulvar
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