lundi 24 février 2014

A LA MANIFESTATION DU 22 FÉVRIER POUR LA DÉFENSE NOTRE DAME DES LANDES A NANTES CE N’ÉTAIT PAS BAGDAD !



Contrairement à ce que profèrent les médias à propos de la manifestation de ce samedi 22 février 2014 pour la sauvegarde de Notre Dame des Landes du projet de construction aéroportuaire, en dépit des apparences, à Nantes ce n’était pas Bagdad !
Petit retour sur les faits dont nous avons été les témoins privilégiés !

Dans l’ensemble et cela il est important de le savoir, la manifestation a été pacifique, déterminée dans sa contestation, créative, festive et bon enfant.
C’est aux alentours de 14 h 30 -15 h que des odeurs de gaz se sont fait sentir de façon diffuse dans la fin de la rue Strasbourg que nous empruntions, en arrivant à l'issue de la rue qui nous menait vers une petite place à traverser, puis vers un pont surplombant un petit cours d’eau, nous avons vu des fumées grises s’échapper et monter haut dans le ciel, puis des fumées noires venant de deux engins de construction qui ont été incendiés.

Un hélicoptère de la gendarmerie tournoyait dans le ciel, prenant assurément des photos, et sur l’autre rive de la berge nous avons pu assister au spectacle des dites émeutes, il faut dire que des barricades avaient été érigées par les CRS le long du tracé de la manifestation. Sur ces endroits barricadés depuis les berges adjacentes, nous avons eu le visuel de ces barricades qui installées de la sorte apparaissaient être disposées comme des souricières. C’est là que le chassé-croisé a eu lieu entre une poignée de fauteurs de troubles (et non le millier de casseurs vanté par les médias) et les forces de l’ordre, avec des échanges de jet de projectiles, de jet de gaz et utilisation de canons à eau.

Ainsi, avec les intox d’avant manifestation laissant croire que celle-ci serait annulée, dans une ambiance en ces instants chauffée à blanc, une volonté de théâtraliser des affrontements violents semblait dès lors limpide à tout observateur attentif. Une analyse renforcée par plusieurs raisons.

Tout d’abord nous avons appris que le tracé a été modifié à la dernière minute par la préfecture et que le parcours habituel des défilés de manifestations dans la ville de Nantes qui traditionnellement passent par la grande artère du Cours des 50 Otages, a été court-circuité et interdit. Le parcours modifié inédit pour une manifestation imposait de débuter au Pont Morrand, près de la préfecture puis de remonter la rue de Strasbourg pour rejoindre ensuite les quais jusqu'à l'île Gloriette et le square Daviais.
Ce sont, aux dires des riverains, sur ces portions empêchées qu’ont été installées certaines des barricades des CRS, une modification servant à fractionner la manifestation et à éviter la photo finish des 50 à 60 000 manifestants, un décompte des organisateurs semblant plus cohérent que celui des 20 000 annoncés par les chiffres police. Ce qui tend à démontrer l’attitude non pacifique de l’État à l’égard des défenseurs de Notre Dame des Landes.













Ensuite ceux qui ont affronté les forces de l’ordre ne sont se jamais mêlés ni infiltrés au gros du cortège, mais ils sont restés la plupart du temps sur ce qui semblait être des petites scènes de spectacles aménagées, ils n’ont jamais rejoint le coin des tracteurs où ils auraient eu stratégiquement l’avantage sur les CRS, ensuite les forces de l’ordre n’ont commencé à charger qu’une fois que les tracteurs de la confédération paysanne ont levé le camp. Cela a fait dire à plusieurs participants que tout ceci sentait l’organisé, le coup fourré.

En réponse à ces débordements en marge des cortèges, les manifestants ont resserré les rangs et ont poursuivi jusqu’au bout la manifestation. Quand les premières déflagrations assourdissantes ont retenti, provenant des tirs de flash-ball des CRS, les cornemuses, les cymbales et les drums des groupes de musique à pied qui animaient les défilés ont redoublé de cadence, avec la ferveur cette fois de pas se laisser pourrir la manifestation, les drums ont retenti si fort que par moment ils sont parvenus à couvrir le bruit tonitruant des tirs des CRS.
Un véritable exploit et un tour de force des organisateurs !

Simplement au lieu de s’éterniser très tard, les organisateurs ont donné l’ordre de dispersion dans le calme non sans avoir appelé à de futurs rassemblements. Au moment de la dispersion les CRS ont chargé la foule dans la ville y compris les simples passants qui faisaient leurs courses tranquillement dans le centre-ville, qu’il y ait eu des femmes et des enfants, cela n’a pas empêché les CRS de lâcher des gaz lacrymogènes.

Concernant les déprédations dont parle la presse , il s’agit principalement de l’enseigne du promoteur du projet aéroport Vinci , dont la vitrine a été taguée et brisée, car dans les faits si certains édifices ont fait l’objet de jets de peinture dont l’hôtel de police , en fait très peu de magasins ont été cassés , nous n’ avons vu nous non plus aucun acte de vandalisme .
En tout et pour tout, une dizaine de vitrines ont été brisées partiellement, hormis celle de Vinci, quelques mobiliers urbains (vitres d’abris de tram de bus) et panneaux publicitaires ont été détruits, des pavés arrachés à certains endroits entre les rails du tram sur la place du commerce. Mais dans des proportions bien moindres que les descriptions apocalyptiques décrites par la presse.

On peut pointer du doigt les tags fortement contestataires, mais au regard de la violence et sa dimension irréversible que représentera la construction de l’aéroport c’est un moindre désagrément, par ailleurs en repartant nous avons pu voir que la devanture de l’enseigne de Vinci était déjà en réparation par un artisan du coin.
Quant aux murs avec des inscriptions anti-capitalistes, ils étaient lessivés par des professionnels sous escortes mobiles des forces de l’ordre.
De tout ceci la presse classique n’en parle pas et pour cause, nous ne l’avons pas vue sur le parcours mais nous l'avons vue soigneusement rangée aux abords des barricades des CRS où avaient lieu les affrontements.
Pas un instant nous ne les avons aperçus au cœur de la résistance farouche des véritables manifestants, ou du moins s'ils s’y sont mêlés tout de même en début de manifestation, ils n’en rapportent pas un mot, c’est sûr que dire que Nantes baignait dans un enfer apocalyptique doit être plus vendeur.

Du reste, si la ville était si plongée dans le chaos comme le décrit la presse, en repartant nous n’aurions pas croisé ces très nombreuses personnes (sans doutes des manifestants se restaurant un instant) tranquillement attablés aux terrasses des cafés de la place Royale en plein centre-ville historique et non loin du théâtre des opérations.

Une chose essentielle ressort dans les événements de la manifestation de ce 22 février à Nantes, c’est que le jeu répressif de l’Etat ne joue pas en sa faveur car la manifestation non seulement a eu lieu et elle a eu lieu jusqu’au bout.
Ensuite la manifestation a été très forte, elle a dépassé le cadre régional car des participants sont venus de toute la France, des organisations solidaires ont été mises en place tant pour leur venue ainsi que pour leur accueil chez l’habitant, des manifestants sont même venus de Belgique.

Et c’est là le second échec gouvernemental à savoir que les résistants de la ZAD de Notre Dame des Landes sont soutenus par d’autres mouvements populaires et citoyens autres que ceux de la région, par exemple en France différents collectifs parisiens avaient fait le déplacement tels que les indignés de Réelle Démocratie Maintenant, le collectif des Engraineurs, les End-écocides, le mouvement défenseur du vivant de la terre et de ses autochtones Idle No More France, les associations prônant la sortie du nucléaire, Attac, en outre des organisations Occupy et d’autres associations citoyennes, syndicales , altermondialistes, politiques de provinces, se sont également rendues à Nantes ce samedi.

De surcroît le soutien au mouvement est également européen, car dans d’autres lieux en Europe comme à Stuttgart en Allemagne, à Turin en Italie, à Rosia Montana en Roumanie des projets colossaux de destructions de la nature sont à l’ordre du jour et rencontrent eux aussi de fortes oppositions.
Les luttes tendent à se rejoindre et se fédèrent notamment par la tenue de grands forums internationaux tels que ceux des Grands Projets Inutiles et Imposés dont le prochain se tiendra au mois de mai en Roumanie à Rosia Montana.

Sur place à Nantes, loin de briser les aspirations de résistance, les manœuvres étatiques même si elles ont dégoûté un bon nombre de personnes ce samedi, dans l’ensemble les participants n’ont pas été dupes, et leurs déterminations s’en sont trouvées renforcées. Comme ils ne cessent de le dire, ils ne lâcheront rien et pas de doute, ils seront aidés et soutenus dans leur acte résistant.

Le gouvernement devrait, plutôt que de s’obstiner sur ce dossier, réfléchir à changer les cartouches de son fusil et songer le plus sérieusement du monde à ne pas exécuter ce projet néfaste à plus d’un titre. Les messages envoyés par les opposants sont clairs et nets, il vaudrait mieux qu’ils soient entendus car au contraire, si l’Etat et les multinationales s’entêtent « l’Ayrauport inutile » pourrait devenir le bourbier de la Hollandie et sonner le clairon de la fin des haricots car parole de banderole le proclamant : « vous navet pas le droit de nous carotte » !

Emmanuelle Bramban 

















Photos prises à Nantes ce samedi 22 février 2014.

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