mercredi 13 janvier 2010

«J'ai vu la mort! J'ai vu la mort!»


«J'ai vu la mort! J'ai vu la mort! Le mur est tombé à côté de moi. La ville est détruite. Les routes sont fermées. Il y a des gens partout dans les rues. C'est vraiment difficile ici, c'est le chaos total.» Photographe à La Presse, Ivanoh Demers a eu juste le temps de sortir de son hôtel de Port-au-Prince avant de voir un mur s'effondrer tout juste à côté de lui. Lui et la journaliste Chantal Guy sont en Haïti depuis dimanche pour réaliser un reportage sur l'univers décrit dans le dernier roman de Dany Laferrière, L'Énigme du retour.

Mardi en soirée, durant quelques minutes, Ivanoh Demers a réussi à entrer en communication avec La Presse par téléphone satellite. En état de choc, secoué, la voix tremblante, il a décrit la scène de désolation qui frappe la capitale et plus particulièrement le quartier «Le Carrefour» où lui et Chantal Guy séjournaient.

«Il y a des grandes fissures dans les murs, dit-il. Tous les édifices qui sont le moindrement élevés sont détruits. Il y a des hélicoptères partout.

C'est la nuit présentement. Nous, on est à l'extérieur de l'hôtel. Il y a des gens partout parce qu'ils ne peuvent pas entrer dans les hôtels. Tout le monde crie.» Ivanoh Demers se trouvait dans sa chambre d'hôtel et travaillait au montage de son reportage sur Dany Laferrière lorsque la terre s'est mise à trembler.

«Les murs ont commencé à brasser, à tomber à terre, raconte M. Demers. Je suis parti en courant. J'ai couru pour ma vie. Les gens criaient Jésus! Jésus! Jésus! C'était absolument irréel. Ça n'avait aucun bon sens! Je suis sorti de ma chambre et le mur de l'hôtel où j'étais s'est effondré à côté de moi. Tout tombait partout. C'est un cauchemar. Nous sommes contents d'être vivants et nous allons prier pour que demain, ce ne soit pas la catastrophe.»

Dany Laferrière irait bien

Une partie du reportage de nos collègues s'est faite en compagnie de Dany Laferrière qui se trouve lui aussi en Haïti. M. Laferrière n'était pas dans le même hôtel au moment du tremblement de terre. Tard mardi soir, personne n'avait réussi à lui parler. Mais son épouse Maggie, qui est à Montréal, à reçu des nouvelles encourageantes par personne interposée.

«Je n'ai pas de nouvelles directes mais quelqu'un vient de m'appeler et m'a dit qu'elle a reçu un SMS de quelqu'un d'autre (venant de) Dany qui fait dire à sa femme de ne pas s'inquiéter. Donc, c'est une nouvelle de quatrième main mais c'est tout ce que j'ai, a-t-elle dit avec calme. Ça rassure un petit peu.» Elle tentait sans cesse de communiquer avec Haïti mais n'y parvenait pas.

«Je ne vais même pas dormir, vous pouvez vous imaginer», a-t-elle ajouté.

Mardi soir, Dany Laferrière devait donner une entrevue de 19h à 20h à Radio Kiskeya avec d'autres écrivains. Il devait participer avec deux autres écrivains québécois, Nicolas Dickner et Michel Vézina, au festival littéraire Étonnants voyageurs. Nos reporters devaient aussi s'y rendre.

Responsable de nos pages Lectures, Chantal Guy a alimenté sa page Facebook jusqu'à 15 heures mardi, écrivant d'abord : «À Port-au-Prince, les coqs sont fous, ils hurlent à n'importe quelle heure toute la journée». Puis : «Sans oublier les chiens qui gémissent à s'en fendre l'âme ».

Dans un courriel envoyé tard lundi soir, Chantal se réjouissait de sa première expérience en Haïti, nous écrivant : «Magnifique journée aujourd'hui avec Dany. Il a été particulièrement généreux de son temps, compte tenu qu'il est un homme extrêmement sollicité. Nous l'avons usé à la corde. Nous sommes nous-mêmes brûlés, mais contents.»

Les gens crient et hurlent

Nos collègues séjournaient dans un secteur de Port-au-Prince qui s'appelle Le Carrefour.

Tout près de là, une partie d'une montagne se serait effondrée. L'hôtel situé à côté du leur s'est complètement effondré. Le leur, Villa Créole, est aussi dans un piteux état.

«Ça va être le chaos demain matin lorsque le soleil va se lever. Je ne sais pas ce qui va arriver avec ça, a dit Ivanoh Demers. Je pense que la nuit va être longue. On espère juste qu'il n'y aura pas une deuxième secousse parce que ça a branlé deux ou trois fois après la secousse principale. Ici, les murs sont tous à terre. On entend les gens crier et hurler. On les entend de partout. Je pense que ce qu'il y a de plus difficile, c'est cela. C'est très désolant.

Et puis, il ajoute : «On a eu la peur de notre vie. On est chanceux d'être vivants.»

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