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vendredi 26 mars 2010
DISCOURS D’INVESTITURE DU PRESIDENT DU CONSEIL REGIONAL DE LA MARTINIQUE
Chers élus et chers compatriotes,
Ce n’est pas seulement avec confiance et détermination que j’accède à cette présidence aujourd’hui. Je le fais surtout avec une grande, et sincère, et très profonde humilité.
Conscient du poids de la responsabilité que notre équipe porte désormais, je suis totalement persuadé que l’humilité, et le respect de l’autre, sont des valeurs essentielles que nous devons réintroduire dans notre vie politique. Mais, si un tel sentiment m’habite en ce moment, avec autant de force, c’est pour de nombreuses raisons. Des raisons qui relèvent autant de ma vie personnelle que de l’histoire de notre pays et du développement de ses institutions.
La première raison de cette humilité, c’est que mes pensées m’inclinent vers deux grands Martiniquais qui m’ont précédé à ce poste. Aimé Césaire n’a pas été seulement le premier président du premier Conseil Régional, il y a 27 ans. Il a été, au sens propre du terme l’inventeur de cette institution. Dans une France gangrenée par cette maladie, si française, que l’on a appelée un peu vite le jacobinisme, il a été a été le premier responsable politique à évoquer en 1958, une décennie avant Michel Rocard et un d’un quart de siècle avant le vote de la loi de décentralisation de 1982, sous le gouvernement de Pierre Mauroy, à évoquer la nécessité d’ en finir avec l’ultra-centralisme qui minait la République.
Je veux aussi parler de Camille Darsières qui restera dans nos mémoires comme un président visionnaire et bâtisseur de la Région Martinique. C’est l’occasion pour moi de les rétablir post mortem dans leur dignité.
Je pense aussi à mes prédécesseurs directs -- au président Émile Capgras, au président Alfred Marie-Jeanne -- qui ont su animer la Région Martinique de leurs convictions et du désir incontestable de faire avancer notre pays sur la voie de l’épanouissement et du progrès. Le Président Marie-Jeanne, qui m’a adressé ses vœux de réussite, a choisi de ne pas siéger au sein de cette assemblée.
C’est un choix que je regrette mais que je respecte.
Je lui adresse en retour tous mes remerciements et toute ma gratitude pour ces douze années de dévouement au service de notre pays et de son devenir.
Je pense aussi à notre regrettée collègue, Christiane D’Orléans, femme de travail, femme d’intelligence, femme de courage, dont l’action quotidienne au cœur de cette assemblée aura laissé ce manque considérable que nous percevons encore et qui, je le pense sincèrement, nous accompagnera longtemps.
Un tel exemple me fait penser à ces milliers de Martiniquais et de Martiniquaises, toujours anonymes, trop souvent oubliées, qui, ouvriers, pêcheurs, agriculteurs, intellectuels, ou militants politiques, nous habitent et qui de tous temps ont été les moteurs de notre histoire.
Je pense enfin à ces 78193 électeurs qui m’ont honoré de leur confiance et qui dans le même temps m’ont confié la lourde responsabilité de leurs espérances et de leur désir ardent d’une Martinique nouvelle.
A ceux-là, je dis que j’assumerai cette tâche avec toute la vigueur dont je serai capable. Mais je leur dis aussi que je ne serai pas seul dans cette tâche. Je serai avec tous les élus et tout le personnel de cette assemblée, avec tous les maires et tous les conseillers généraux, avec toutes les forces productives, toutes les intelligences de la société civile, toute la créativité de nos artistes, toute l’implication des acteurs économiques et sociaux, les entreprises, les partenaires sociaux, tout le dynamisme de nos jeunes et toute l’expérience de nos Grandes personnes. La Martinique nouvelle naîtra de la mobilisation et de la participation de tous, et je serai résolument au service de cette dynamique !
J’ai de même une pensée pour tous mes adversaires, et pour ces milliers de Martiniquais dont les suffrages se sont portés sur les listes qu’ils dirigeaient. A ceux-là, je dis que la période électorale est terminée. Ce que nous devons en garder ce sont toutes ces idées, ces différences, ces divergences qui se sont exprimées, et qui ne témoignaient que de deux choses : d’un amour partagé du pays et du souci de son devenir !
La Martinique nouvelle naîtra de l’expression de sa diversité mise au service d’une intention commune, et je serai résolument attentif à ce qui ouvre contre ce qui clôture, à ce qui rassemble contre ce qui divise !
2 - La crise et le plan de relance.
Au moment où je parle, des centaines de Martiniquais vivent dans des difficultés immenses. Des centaines d’hommes et de femmes, jeunes et vieux, qui ne savent plus comment payer leur loyer, comment faire face à leurs dettes, comment se loger, comment se former, comment trouver de quoi s’acheter le minimum vital pour eux-mêmes et pour leurs enfants ! Des retraités qui ont tant travaillé au service du pays, et qui voient de jour en jour leurs ressources diminuer tandis que se profile en face d’eux le spectre du manque et de la pauvreté ! Des mères de famille qui vivent le tourment de l’avenir de leurs enfants, sans emploi, sans formation, sans perspectives, et sans espoirs ! Des jeunes qui ne comprennent plus cette vie, et qui ne comprennent plus leur vie, et qui ne se lèvent le matin que pour se perdre dans le désœuvrement ! A la fin de ce mois, des entreprises auront fermé leurs portes, ou auront licencié, et de nouveaux Martiniquais, de tous âges, entreront dans cette angoisse de la perte d’un emploi et de la difficulté quasi insurmontable de se remettre en selle !...
Il y a tout cela derrière les mots de “crise” et de “récession” ! Il y a tout cela derrière ma décision de me présenter à ces élections régionales ! Partout où je dirige mon regard, je ne vois l’ampleur infernale des problèmes et des difficultés. Mais cela ne fait que me conforter dans la conviction qu’il faut à la fois, et sans attendre, traiter toutes ces urgences, apaiser les souffrances , mais ne rien négliger de l’impérieuse obligation d’aller à l’essentiel, et de transformer en profondeur ce système social, économique et culturel dans lequel nous sommes depuis trop longtemps naufragés !
La crise de février 2009 est née de ces difficultés insupportables, tout comme elle est née d’un malaise plus profond qui porte sur le sens même que nous donnons à notre vie. Elle nous a forcés à nous interroger sur la finalité de la croissance économique, mais aussi, sur les valeurs que nous devons véhiculer dans notre vie quotidienne tout comme dans notre vie institutionnelle et politique. J’ai l’intention de mener une véritable réflexion sur toutes ces notions qui à mon avis ne peuvent que constituer la base même de tout projet global, de toute vision véritablement politique, et de toute construction institutionnelle.
Mais ce souci de l’essentiel et du fondamental ne nous empêchera pas d’agir. Dès ce mois-ci, sitôt après la mise en place des commissions, je prendrai toutes les initiatives nécessaires afin de mettre en œuvre un plan de relance de l’activité et de l’emploi. Pour cela, j’utiliserai la dynamique centrale que peuvent constituer la commande publique, le BTP, mais aussi les grands travaux structurants dans le domaine des équipements publics, du logement, de l’habitat, (et là je pense aux sinistrés du cyclone Dean qui vivent depuis déjà trois ans dans une situation intolérable !). Grands travaux structurants dans les transports, dans la prévention des séismes, dans les énergies renouvelables, dans le tourisme, dans la revitalisation de l’agriculture et de la pêche…
Tout sera fait pour multiplier le nombre de jeunes, de femmes et de chômeurs, qui avec l’aide de notre institution pourront avoir accès à des formations qui ne soient pas des lieux de garages, mais qui, avec des soutiens spécifiques aux entreprises, s’inscriront dans une stratégie globale, coordonnée et innovante, de formation continuée tout au long de la vie. Des formations à la fois mieux adaptées à nos réalités économiques et culturelles, tout comme à la vision que nous allons dégager des besoins d’une Martinique nouvelle !
Tout sera fait pour permettre, dans le cadre de ce plan de relance, une mise en activité du plus grand nombre, face à ce drame qu’est le chômage.
Notre relance s’inscrira d’emblée dans la perspective d’une Martinique plus propre, plus verte, plus bleue, et mieux inscrite dans un respect dynamique, valorisant et productif, de son environnement, de sa faune, de sa flore et de sa biodiversité !
Mais notre relance se situera aussi tout autant, dans le souci de l’efficacité d’une politique d’investissement public que dans celui d’une rigueur budgétaire exemplaire. C’est donc au nom cette exigence que sera crée une commission ad ‘hoc de contrôle, d’évaluation et de prospective de nos politiques publiques.
Toutes ces mesures, et beaucoup d’autres encore, ont été largement détaillées dans notre programme pour une Martinique nouvelle, et je ne m’y attarderai pas ; mais je veillerai à ce que toutes nos propositions soient affinées par la concertation la plus large possible ; par l’implication accrue des socioprofessionnels dans tous les lieux d’élaboration ; mais aussi par l’implication des femmes, des jeunes, et des aînés dont l’expérience et l’expertise sont pour nous des ressources irremplaçables. L’exigence de cette relance et son urgence peuvent nous rassembler tous, sans exclusive, autour d’un pacte économique social et culturel qui servirait de socle à la dynamisation des espaces géographiques que nous avons définis sur toute la Martinique.
La Martinique est à la fois une et diverse, Atlantique et Caraïbe, elle a un centre et des extrêmes, elle connaît l’eau abondante et la sécheresse lancinante, elle a des lieux de prolifération urbaine, des zones rurales, des campagnes et des zones plus contraintes, d’enclavement et de paupérisation. Chacune de ces facettes du pays devra trouver sa dynamique particulière qui entrera en synergie avec les autres. Une synergie qui apportera sa diversité à notre projet d’ensemble ! Car il ne peut exister de suprématie du monde urbain sur le monde rural, comme il n’y aura pas de privilège pour la ville de Fort de France, comme pour n’importe quel quartier, bourg ou commune, au détriment des autres. Je m’engage à un traitement juste et équitable pour chacune des parcelles de vie de ce pays !
Je prendrai des initiatives pour qu’une nouvelle gouvernance naisse : quelque soit leur couleur politique, j’irai moi-même à la rencontre des maires, des élus, des présidents de communautés, des acteurs économiques, sociaux et culturels, pour créer les conditions les plus larges et les plus favorables au redémarrage de la Martinique. Des les prochaines semaines, je me rendrai dans des communes du Nord atlantique, et du grand Sud, pour dialoguer, échanger, mieux comprendre et partager notre vision du renouveau.
Une collectivité dont la responsabilité instituante est indéniable
Mais aucun plan de relance ne pourra fonctionner si deux éléments ne sont pas réunis : l’implication participative de tous, et la nécessité de croire en nous-mêmes !
Le peuple martiniquais à traversé les épreuves les plus effroyables, depuis l’esclavage jusqu’aux formes de dominations et d’exploitations les plus achevées. Et toujours, il a su forger des générations dynamiques qui ont fait avancer notre Histoire, et qui nous ont guidés sur les chemins de plus de conscience et plus de liberté. Nous avons cette force en nous, il nous faut simplement la mettre en œuvre ! Rien n’est impossible à un peuple qui retrouve la confiance en son génie pour inventer des voies nouvelles et réussir ! Donc, rien ne nous est impossible !
Face à la perspective de la collectivité unique (appelé de nos vœux depuis 27 ans obtenue en 1982 et victime d’un recours devant le conseil constitutionnel) ; je disais face à la fusion de nos deux collectivités, régionale et départementale, nous serons tenus d’exercer nos missions dans un contexte de cohabitation. Je souhaite qu’elle soit la plus constructive et la plus respectueuse et je prendrai toutes les initiatives de nature à la faciliter.
Je considère que les contraintes particulières d’une telle fusion (dans le respect des droits des salariés, dans la complexité des enjeux financiers et fiscaux, de l’inventaire du patrimoine et des valeurs afférentes, de l’organisation et de la gestion des ressources humaines, dans le domaine de la qualité du travail et de la stabilité économique), nous imposent de mettre en place avec le Conseil général, le plus tôt possible, un groupe de travail pour préparer ce dossier central pour l’avenir de la Martinique.
Le peuple s’est prononcé le 10 et le 24 janvier. Nous nous devons de respecter son vote et de nous atteler, au cours de ce mandat de transition, à mettre en place cette institution nouvelle, qui s’inscrit, qu’on le veuille ou non, dans une dynamique de responsabilité !
A la préparation de la loi ordinaire qui définira les modalités de mise en œuvre de cette nouvelle collectivité, s’ajoutera celle de la réforme de la loi organique de février 2007, visant à l’allongement des délais d’habilitations qui devront permettre à notre pays de légiférer sur des questions aussi transversales et fondamentales que celles qu’implique toute volonté de développement durable ! Nous devrons y travailler sans attendre avec toute l’audace et toute l’imagination possible ! Et nous devrons nous battre pour convaincre et faire advenir ce que nous aurons collectivement décidé !
Un profond changement sur le plan du développement
économique et social.
La durée de ce mandat qui s’ouvre est limitée dans le temps.
2 ou 4 ans selon les différents vœux qui ont été formulés.
Quel qu’il sera, nous devrons mettre à profit chaque heure, chaque jour, chaque semaine, pour élaborer un projet audacieux, un projet ambitieux qui ouvrira de nouvelles perspectives économiques, sociales, écologiques et culturelles !
Des outils nouveaux doivent être créés en concertation avec les institutions en place : établissement public foncier ( pour relancer le logement et le tourisme) ;l’amélioration de l’efficacité des outils d’aide et de soutien aux entreprises ;la réforme du comité martiniquais du tourisme, tant dans sa gouvernance que dans le champs de ses interventions ; la réforme de l’ARPEL ; (l’aide aux commune) ; la révision du SAR et l’activation du SDAT ; la recherche d’efficacité et de cohérence dans la gestion des fonds Européen pour mieux optimiser leur mobilisation à partir d’une ligne directrice et des outils clairement et politiquement identifiés ; la mises en place des outils de prospective et de planification dans le domaine de la formation professionnelle et de l’éducation et de la culture. (Je souhaite faire de la Formation professionnelle un levier de développement : en contribuant par le biais de partenariat à la professionnalisation des salariés et des chefs d’entreprises par une meilleure compétitivité des entreprises
En favorisant l’insertion professionnelle des jeunes avec une attention particulière pour les personnes à mobilité réduite, les femmes , grâce à une offre de formation plus adéquate avec le monde économique, (les partenariats seront vivement sollicités), des outils de planification et de stratégie en matière d’énergie renouvelable, je veux parler du plan énergie, climat, territoire… ; la meilleure utilisation d’outils financiers modernes tel que le partenariat public privé ; le recours plus volontaire aux concessions de service public, des sociétés d’aménagement et de HLM, pour démultiplier l’efficacité des politiques publiques...
Une énumération complète de toutes ces urgences serait interminable. Il faut simplement que les martiniquais sachent que nous utiliserons toutes nos forces pour préparer la Martinique à relancer et à consommer sa production locale, en travaillant filière après filière, dans le domaine de l’artisanat, de l’agriculture, de l’élevage, de la pêche, du tourisme..., Tourisme où le fondement de notre démarche sera une amélioration sans précédent de l’attractivité économique, culturelle et sociale de notre territoire, dans une dynamique ou l’esprit entrepreneurial et la volonté politique joueront une partition commune ! C’est par son rayonnement culturel et social, son inventivité économique, l’éclat de son agriculture et de sa pêche, et son rapport exemplaire aux technologies nouvelles et à son environnement que la Martinique sera aimé et sera visitée !
La Région ne doit pas fuir l’autre responsabilité majeure qui est de soutenir et d’encourager le dialogue social. A cet égard, je mettrai en place très rapidement un référent permanent dont la tâche sera d’inventorier les initiatives en cours dans ce domaine, de les fédérer, et de leur permettre d’accéder au plus vite au soutien de la puissance régionale et d’une volonté politique attentive et sans faille !
Nous ne pourrons pas non plus faire l’économie d’une réflexion sur quelques enjeux majeurs : la fiscalité locale (notamment la question de l’octroi de mer) ; l’activation d’une culture régionale du développement en recherchant la meilleure union régionale possible avec la Guyane, la Guadeloupe en associant, sur le fondement d’initiatives sectorielles des pays tiers de notre espace caribéen, et même américain. Je prendrai l’initiative d’une rencontre avec les Présidents Victorin LUREL et Rodolphe ALEXANDRE, pour définir les modalités de cette union, et le traitement de dossiers sensibles comme la question du carburant et de l’avenir de la SARA.
Enfin l’urgence qu’il y a à trouver des solutions rapides innovantes et opérationnelles exigent l’implication participative du plus grand nombre possible de citoyens. Pour cela, nous allons prendre l’initiative d’ouvrir la Région à toutes les inspirations et à toutes les contributions : directement (par des commissions ad hoc) ou par tous les modes relationnels que nous offre Internet. Je veux prendre comme exemple la question de la jeunesse qui devrait tous nous mobiliser, sans exclusive politique, vers un plan de grande ampleur. Une commission spécifique sera créée à cet effet.
Enfin, des sujets d’actualité et d’une grande importance doivent être érigés en chantier prioritaires : la question du lycée Schœlcher doit être réglée, tout comme la réhabilitation des lycées dans les communes où des travaux d’urgence doivent être mis en œuvre sans attendre.
4– Les principes et les valeurs
Dans la mise en œuvre de notre relance, comme dans notre Projet qui ira au-delà de cette mandature, il ne nous faudra pas perdre de vue l’essentiel et le fondamental. Et cette exigence demande le rappel de quelques-uns de mes principes.
Voici le premier des principes qui m’animent : c’est d’abord aux Martiniquais qu’il appartient d’imaginer et de mettre en œuvre la destinée martiniquaise !
Le docteur Aliker a eu raison de rappeler que nous sommes les meilleurs spécialistes de nous-mêmes. C’est pourquoi nous avons toujours revendiqué une responsabilité pleine, c’est à dire une capacité d’agir et d’exister sur nous-mêmes, dans notre environnement et dans le monde, sans pour autant remettre en cause notre appartenance au pacte républicain français. Entre une idée de nous-mêmes qui passe par l’assimilation pure et simple, et une autre conception de notre épanouissement qui passe par la fragilisation aventureuse, nous avons proposé une voie nouvelle.
Les Martiniquais ont rejeté la fragilisation aventureuse mais ils n’ont pas rejeté la possibilité d’agir sur leur destin !
Ils n’ont pas rejeté un renforcement de nos compétences qui ne remettrait pas en cause tous les acquis économiques et sociaux qui nous ont été assurés par la lutte héroïque de nos aînés !
Ces acquis sont un héritage qu’il nous faut protéger. Mais ce n’est pas un héritage destiné à nous immobiliser voire à nous aliéner dans des postures et des institutions qui ne correspondent plus aux évolutions de notre conscience, ni aux réalités du monde actuel ! Bien au contraire ! Nos ancêtres se sont battus pour que nous soyons plus libres ; ils se sont par là-même battus pour que le progrès demeure à notre portée, dans un champ constitutionnel capable de reconnaître nos différences, notre identité et notre personnalité collective ! Et ce qu’ils attendent de nous, c’est que nous ne soyons pas seulement des hommes libres, mais des hommes conscients, des hommes inventifs et des hommes responsables !
C’est d’ailleurs moins un héritage qu’une sommation !
Et cette future collectivité unique devra répondre à cette sommation ; plus de conscience, plus d’inventivité, plus d’audace, plus de responsabilité, et plus de démocratie ! La France ne doit plus être pour nous une simple source d’aides, de subvention ou de transferts. Elle doit devenir le partenaire de notre effort collectif vers une Martinique nouvelle, mieux installée en elle-même et mieux inscrite dans la Constitution républicaine française !
Voici le deuxième de mes principes : pas de développement ou d’épanouissement sans une bonne gouvernance !
A cet égard, la mise en cohérence de nos institutions par la mise en place d’une Collectivité unique devra s’accompagner d’une vision à la fois plus globale et plus différenciée de l’espace martiniquais. Il y aura des développements géographiques dans un épanouissement global, avec des articulations, et des modalités de démocratie participative qui feront que la responsabilité du cheminement commun sera celui de chaque commune, de chaque mairie, et de chaque Martiniquais. Nous devrons être inventifs pour une nouvelle articulation des services de l’Etat, des administrations, et des institutions locales. Pour une meilleure articulation entre les forces productives et les forces sociales. Pour une meilleure implication de la société civile aux décisions publiques. Pour un meilleur agencement des instances universitaires, culturelles et artistiques dans le monde économique et social. Enfin, pour une meilleure prise en compte des trajectoires individuelles afin que l’épanouissement de tous se fonde sur l’épanouissement de chacun !
Enfin, dernier principe : pas de développement ou d’épanouissement sans des institutions fortes.
Nous entrons dans un siècle difficile, avec des menaces sur l’équilibre même de la planète et le déploiement d’une logique économique globale dont la seule perspective est le profit maximal.
C’est un siècle qui demande la mise en place d’institutions fortes, transparentes, fondées sur la diversité et le plus haut degré possible de démocratie. Une bonne institution bien pensée bien équilibrée, inscrite dans une implication participative de tous, est plus nécessaire qu’un quelconque homme providentiel, ou que le plus vertueux des systèmes idéologiques.
Et si une telle institution est au service de valeurs comme celle de la solidarité, de la citoyenneté active sans esprit de profit. Si elle est soucieuse de principes clairs et de valeurs tutélaires qui remettent l’humain au centre de tout le déploiement économique social et culturel. Si elle sait animer un secteur privé dynamique et mobiliser sa société civile, accorder toute sa place à la jeunesse et aux personnes âgées. Si elle peut dans son fonctionnement assurer à la fois toute la stabilité utile et le renouvellement quand il est nécessaire... Alors nous pourrons tout à la fois agir sur nous-mêmes et agir sur le monde !
Ceci pour vous dire toute l’importance que j’accorderais à l’élaboration des modalités de mise en œuvre, de fonctionnement et d’action de notre future collectivité unique. Nous pouvons en faire une assemblée instituante, un outil au service de l’intérêt du pays tout entier et qui fondera les bases généreuses, inédites et solidaires, d’une Martinique nouvelle !
4 - L’appel au travail
Aux personnels du conseil régional, je sais que certains agents se sentent démotivés, ou ne comprennent plus le rôle qu’ils doivent jouer. Le personnel de cette administration doit être respecté, et c’est par le dialogue que nous pourrons ensemble permettre à la Martinique de rentrer dans une ère nouvelle. Je compte donc sur une administration loyale, homogène, structurée, qui veille à placer chacun, dans le cadre de la réorganisation que je proposerai, dans le rôle qu’il doit jouer au quotidien pour la réussite de l’action publique.
Aux Martiniquais qui nous écoutent, je dis que la Martinique est un grand pays ! Un pays capable d’affronter et de relever tous les défis, à condition que nous ayons confiance en elle et confiance en nous-mêmes !
Je dis que la Martinique sera ce que nous en ferons, par notre participation à la vie publique, à la vie économique, à la créativité culturelle. Elle sera ce que les femmes, les hommes, les jeunes, les grandes personnes de ce pays en feront !
Le monde qui vient est imprévisible et incertain, nous ne pourrons jamais le soumettre à des plans ou à des programmes mécaniques et rigides ; mais nous pourrons l’affronter avec notre sens des responsabilités, notre ardeur au travail, notre capacité à imaginer du nouveau et à le mettre en œuvre !
Cette mandature ne sera pas celle d’un simple Conseil Régional. Elle sera celle d’une assemblée de travail ! Une assemblée de fondation et de prospectives ! Une assemblée soucieuse de l’épanouissement de toute la Martinique, et elle se sentira responsable de tous les domaines qui concerneront l’avenir, le bien être et l’élévation de tous les Martiniquais !
Je vous remercie tous, infiniment !
Fort de France le 26 mars 2010
Serge LETCHIMY
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