jeudi 16 mars 2017

Déclaration importante de Karim Akouche


Je suis dans l'avion. Je quitte l'Algérie en urgence. Direction Paris. J'improvise ce texte. Des menaces sérieuses, sur mon intégrité physique, pèsent sur moi. Tout cela à cause de mon roman : La Religion de ma mère. Mes idées d'écrivain libre dérangent. Ma plume est tranchante. Elle gratte les plaies. Elle détruit les faux mythes, les tigres de faïence, les mensonges des notables... Je suis déchiré, triste et révolté à la fois. Ma colère est saine, je n'aime pas la violence... J'ai le regret d'informer mes lecteurs et ceux qui m'ont invité pour des conférences un peu partout (Alger, Bouzeguene, Boudjima, Idjeur, Bougie, Aokas...) que celles-ci n'auront pas lieu. Ce n'est pas par faute de courage. Je compte sur leur compréhension. J'ai l'expérience de la résistance. Je connais mes ennemis. Je refuse d'être leur proie. Je combats leurs idées. Ils haïssent ce que je représente, ce que je pense, ce que je formule. Je le sais pour avoir essuyé moult menaces. Aujourd'hui, la coupe est pleine : On m'a interdit la rencontre à la librairie Cheikh, j'ai fermé les yeux. On a délocalisé ma conférence à l'Université de Tizi-Ouzou, de l'auditorium vers la grande salle de lecture, sous un prétexte farfelu, je n'ai rien dit. On a fait subir des interrogatoires à des amis et proches, j'ai fait semblant de ne rien voir. Mais me traquer comme une bête par le chasseur, surveiller mes moindres déplacements, me menacer, chercher à m'atteindre physiquement... cela non !... J'aime la vie et j'ai encore beaucoup de choses à dire, à créer... Je dénonce vigoureusement ces pratiques d'un autre âge. Mon prédécesseur, Mouloud Feraoun, avait de l'intuition, il a vu juste : Nos ennemis d'aujourd'hui sont, hélas, pires que ceux d'hier...
D'autres conférences sous d'autres cieux plus cléments m'attendent. J'irai bientôt chanter la liberté et la littérature un peu partout... Je serai à Alicante, Paris, Bruxelles, Toulouse, Marseille, Montréal, New York, Marrakkech... 
Nul poète n'est prophète en son pays... surtout quand que celui-ci est une risible dictature.

Mes respects, mes chagrins, ma profonde affection,

Karim Akouche
Jeudi 16 mars 2017

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