lundi 12 novembre 2012

Présidence de l'UMP: le séisme politique à venir




L'élection du président de l'UMP pourrait bien entraîner un véritable séisme politique et bouleverser de manière durable les rapports de force au profit de l'extrême-droite, du centre et de la gauche. La droite républicaine est véritablement aujourd'hui à la croisée des chemins.

Qu'on ne s'y trompe pas. La question n'est pas celle de la « droitisation » qui opposerait M. Copé et M. Fillon sur des questions fondamentales comme le rôle de l'Etat, la sécurité, l'efficacité économique et fiscale, l'immigration ou encore les questions sociales et sociétales. Ce n'est pas sur le programme que se jouent les enjeux car, après tout, la longue période de gouvernement avec la dose de réalisme qu'elle suppose ainsi que l'ombre obsédante et quasi-tutélaire de l'ancien président Nicolas Sarkozy constituent un référentiel idéologique unique et impriment une cohésion qui aura du mal à se fissurer. C'est d'ailleurs bien pour cela que les sensibilités politiques constitutives de l'UMP se sont réparties entre les deux camps.

En réalité, la ligne de fracture entre les protagonistes est tout autre. Elle touche au fondamental, à ce qui fait l'essence même des partis républicains et les sépare des extrêmes : les valeurs morales. Elle est essentiellement celle du vivre-ensemble dans une République apaisée et de la capacité à rassembler tous les Français, quelles que soient leurs origines, leurs couleurs ou leurs croyances.

Et le choix que feront les militants pourrait bien interroger la cohésion de la droite et son existence même sous la forme d'un parti hégémonique unique tant il est vrai que les saillies de Jean-François Copé ne peuvent être considérées comme de simples dérapages. Elles marquent un tournant dans l'histoire de la droite républicaine car elles font partie d'une stratégie pensée et assumée pour faire le buzz médiatique et se positionner sur la scène nationale comme celui qui dit la vérité aux Français contre les élites parisiennes... sur le modèle de Jean-Marie Le Pen.

Les techniques empruntées à l'extrême-droite sont connues. User de la provocation jusqu'à la nausée afin de faire passer des messages subliminaux au public dont il cherche à capter les faveurs. Il s'agit de dramatiser la situation du pays, et ensuite de désigner le bouc émissaire, hier le juif aujourd'hui le noir et le musulman, pour se poser en défenseur des « petits blancs » que tout le monde abandonne.

Cette posture est dangereuse dans le contexte d'actualité internationale de mouvements religieux extrémistes qui autorise tous les raccourcis et de crise économique qui fragilise la nation. M. Copé est coupable d'alimenter les peurs des Français, de diviser au lieu de chercher à rassembler et à rassurer, et d'affaiblir délibérément l'unité nationale pour des raisons bassement politiciennes.

Et à trop courir derrière les extrêmes, la droite s'abîme. Ce positionnement porte en germe l'implosion et l'affaiblissement de l'UMP et la montée en puissance du Front National qui se frotte les mains et compte les points avec gourmandise.

Avec Jean-François Copé, ce n'est pas la droite qui est décomplexée mais bien l'extrême-droite. A force de surenchères et de dérapages au moment justement où le FN tente de se normaliser avec Marine Le Pen, on banalise le vote frontiste. En dédiabolisant l'extrême-droite, en donnant une crédibilité à ses thèses et à ses méthodes, on efface les réticences qui jusque-là empêchaient de considérer son émanation comme un parti de gouvernement. Et après tout, plutôt que choisir un parti qui s'est trompé durablement et qui se rallie tardivement à des thèses hier vilipendées, certains électeurs de la droite traditionnelle pourraient bien préférer l'original, le parti qui n'a pas varié sur ces sujets depuis 30 ans.

De la même façon, les modérés, les humanistes, les centristes, écoeurés par cette débauche électoraliste quitteraient en masse l'UMP pour se réfugier auprès d'autres partis plus républicains.

Dès lors, le piège tendu à l'époque par François Mitterrand qui avait favorisé l'émergence du parti frontiste pour diviser la droite et se maintenir au pouvoir pourrait bien se refermer. Le RPR et l'UMP à l'époque de M. Chirac et de M. Sarkozy, malgré des tentations conjoncturelles, avaient su se préserver en maintenant un cordon étanche avec l'extrême-droite. Si M. Copé prenait le pouvoir, l'UMP serait laminée, débordée sur sa droite par le Front National en embuscade et écrasée par les centres qui deviendraient les seuls vrais partis offrant une alternative républicaine crédible au pouvoir en place, sous réserve de trouver une unité.

M. Copé est en cela le meilleur allié du gouvernement Hollande qui se frotte les mains et espère sa victoire afin de se maintenir au pouvoir le plus longtemps possible.

D'ailleurs, son appel à occuper la rue, comme le font les associations ou les mouvements non représentés au parlement, est une agitation de plus qui ridiculise l'opposition et fait les affaires du gouvernement. Jusque-là, les partis républicains, à droite ou à gauche, n'utilisaient cette arme qu'en dernier ressort, lorsque des libertés fondamentales étaient gravement menacées ou sur des grands enjeux nationaux. M. Copé lui, explique sans rire qu'il ne sait pas encore sur quoi ni pourquoi il faut manifester mais qu'il faut le faire en prévision des futures bévues des socialistes.

Tout cela est improductif. Au lieu de se concentrer sur les grands enjeux pour la France et de demander des comptes à François Hollande pour sa gestion approximative de l'intérêt national, l'attention médiatique se focalise sur les petites phrases et les postures de M. Copé qui offrent des diversions faciles et donnent un visage peu ragoutant de l'opposition.

Voilà pourquoi je voterai sans aucune hésitation pour François Fillon, qui est, en l'absence de Nicolas Sarkozy, le meilleur candidat à l'UMP, le seul capable de rassembler le peuple Français et de l'entraîner derrière un projet alternatif crédible.


Patrick Karam,

ancien délégué interministériel pour l'égalité des chances des Français d'outre-mer,
conseiller régional d'Ile-de-France,
ancien responsable de campagne de Nicolas Sarkozy pour la diversité




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