Il n'existe aucune base légale sérieuse à la décision du Conseil constitutionnel qui vient de proclamer Monsieur Alassane Ouattara “président de la République de Côte d`Ivoire" en faisant siennes les décisions contraignantes prises par l’Union Africaine (UA). Cette proclamation est une vraie aberration juridique, politique et historique. Certes, les décisions du panel étaient contraignantes pour les parties, en particulier La Majorité Présidentielle (LMP) et le Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP), mais certainement pas pour l'Etat ivoirien et/ou ses Institutions. Chacun sait qu'il y a une hiérarchie des normes au sein de l'UA comme dans toutes les organisations communautaires. Pour que la décision de l'UA puisse s'imposer dans l'ordre interne ivoirien, il aurait fallu que ce soit un règlement. Or, en l'occurrence, la décision de l'UA n'est ni un règlement ni une directive. Selon l'article 98 de la Constitution ivoirienne, les décisions du Conseil constitutionnel sont insusceptibles de recours. Pis, le Conseil constitutionnel ne peut pas s'auto-saisir en annulant la décision prise en décembre 2011. Sur ce point, il y a lieu de préciser qu’une fois la décision rendue, le Conseil constitutionnel se trouvait définitivement dessaisi de ce dossier, et ne pouvait le reprendre sous une forme quelconque pour modifier sa décision antérieure. La Côte d'Ivoire est donc désormais dans une situation constitutionnelle qui prêterait à sourire s’il n’y avait eu des milliers de compatriotes morts, précisément pour défendre cette Constitution.
Comble du ridicule, la Côte d’Ivoire se retrouve avec deux “présidents de la République” proclamés par la juridiction suprême en l’espace de cinq mois. L'un, Monsieur Laurent Gbagbo, vainqueur de l’élection présidentielle de novembre 2010. L'autre, Monsieur Alassane Ouattara, vainqueur de la campagne militaire postélectorale, porté au pouvoir par l’armée française et les arrangements constitutionnels. Sur le plan légal, Monsieur Laurent Gbagbo demeure le président légitime de notre pays. Cette forfaiture est un précédent fâcheux. Elle crée de facto une jurisprudence Ouattara, lourde de conséquences pour l’avenir de la démocratie et des processus électoraux en Côte d’Ivoire et en Afrique.
Fait à Paris, le 06 mai 2011
Toussaint ALAIN
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