mercredi 28 septembre 2011

Bernard Kouchner: une erreur de favoriser Port-au-Prince


La communauté internationale commet une erreur en concentrant la reconstruction d'Haïti dans sa capitale ravagée par le tremblement de terre de janvier 2010, estime l'ancien ministre des Affaires étrangères de la France Bernard Kouchner. «Vous ne pouvez pas reconstruire à Port-au-Prince, c'est un cul-de-sac!», a-t-il affirmé.

Longtemps pressenti pour diriger la mission onusienne en Haïti, ce cofondateur de Médecins sans frontières croit que la communauté internationale devrait concentrer ses efforts à l'extérieur de la capitale, dans les villes de taille moyenne.



«La reconstruction, ça voudrait dire qu'on ne se remet pas à Port-au-Prince. Mais pour ça, il faut y réfléchir avant. On prend des décisions très vite, on a des positions théoriques, mais on ne connaît pas les gens», a-t-il déploré en entrevue à La Presse, de passage à Montréal, hier.
Le Français reconnaît que sa proposition «est très difficile à faire et [que] c'est aux Haïtiens de le faire». Il n'en démord pas, Port-au-Prince est pour lui «le pire endroit où reconstruire». «On reconstruit toujours au même endroit, celui qui a été touché, et c'est ça, l'erreur.» La forte présence des organisations non gouvernementales vient compliquer encore les choses, celles-ci ayant créé «un État dans l'État».
Bernard Kouchner dit avoir réfléchi à la reconstruction d'Haïti après avoir rencontré le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, qui l'aurait pressenti pour devenir son représentant dans le pays où plus de 220 000 personnes sont mortes dans le séisme de janvier 2010. Mais, revirement de situation, c'est finalement le Chilien Mariano Fernandez qui a été nommé, en mai dernier, pour diriger la mission onusienne, une décision qui laisse Bernard Kouchner amer. «Ils ont eu tort de ne pas le faire. S'il y a une pratique que je connais bien, c'est celle des missions de paix des Nations unies», a-t-il confié.
Celui qui a été haut représentant de l'ONU au Kosovo de juillet 1999 à janvier 2001 dit avoir été écarté en raison du passé colonialiste de la France. «Pourtant, ce n'est pas la façon dont on nous voyait quand je travaillais en Haïti lors de ma première mission pour Médecins du monde», une autre organisation qu'il a fondée après avoir quitté Médecins sans frontières.
Depuis son départ du gouvernement français, en novembre 2010, Bernard Kouchner a lancé une firme de consultation, No Borders Consultants, et prononce des conférences, comme cette semaine à Montréal, Toronto et Calgary.
Pierre-André Normandin

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