L’idée de la construction européenne est née du constat que tout ce que les peuples européens se partagent comme étant le fond commun de leur civilisation, ne les avait pourtant pas empêché des siècles durant de se livrer à des guerres furieuses dont deux de celles-ci, allaient entraîner tout le reste de la planète dans leur tourmente…
Il fallait donc mettre fin une bonne fois à ces guerres qui devenaient mondiales, et c’est pourquoi certaines des nations les plus bellicistes de ce continent ont décidé de placer sous un contrôle commun, les deux éléments principaux dont elles se servaient pour s’armer et faire la guerre, c’est-à-dire le charbon et l’acier…
Ceci donna lieu à la constitution de la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier, la fameuse C.E.C.A. qui fut fondée en 1951, et dont le bon fonctionnement a permis d’ambitionner de créer carrément une zone de libre échange entre six nations européennes, le fameux “marché commun” créé en 1957, et entré en application en 1958…
A partir de la C.E.C.A., ce sont donc les commerçants, les affairistes, et les financiers, qui se sont montrés les principaux artisans de la construction européenne, ce qui n’a historiquement rien de surprenant…
En effet, des siècles durant, ce sont les marchands qui comme tout au long de route de la soie, ont constitué le lien principal voire même souvent le lien unique, entre les nations, et c’est par les échanges qui se sont ainsi établis entres elles, que s’est opéré leur rapprochement, la connaissance les unes des autres, et le partage d’éléments commun de civilisation.
C’est donc tout à fait logiquement que la construction européenne à suivi le même cheminement, les traités politiques se bornant à faciliter les échanges commerciaux entre les nations. Cependant, l’élargissement graduel de ce marché commun à de plus en plus de nations ne pouvait manquer de nécessiter la mise en place d’un cadre institutionnel pour en fixer les règles, en opérer le contrôle, et procéder aux arbitrages en cas de différent, et c’est ainsi que la simple notion commerciale de zone de libre échange, s’est-elle graduellement muée en l’idée d’une intégration politique de l’Europe, laquelle débouchera sur la constitution de l’Union Européenne en 1993…
Cependant, si les marchands, les affairistes, et les financiers se moquent des frontières qui constituent plutôt pour eux, des obstacles au développement, il n’en est pas de même des peuples européens qui de toute évidence, n’étaient pas prêts pour de tels bouleversements. Car, malgré leur fond commun, leur très grande diversité culturelle qui est corrélative à des différences de sensibilité, impliquant des choix différents de société, tout comme les restes ataviques de leur rivalités et hostilité d’antan, ne leur ont pas permis de se sentir et de se vivre aussi rapidement que cela, comme étant des Européens…
Il aurait fallu laisser davantage de temps pour que les choses puissent tranquillement se mettre en place, ou alors que cette intégration se fasse d’une façon autoritaire sous la férule d’un chef guerrier s’en venant soumettre par la force sous sa loi unificatrice, tous les peuples européens, comme cela s’est traditionnellement toujours fait, concernant la construction des grands empires…
Mais ce ne fut ni l’un ni l’autre…
Car, les tentatives guerrières pour créer l’union comme celles de Napoléon et de Hitler n’étant évidemment plus d’époque, et face à la nécessité de constituer une zone de solidarité économique qui puisse être concurrentielle dans un monde en marche, c’est par un cours forcé de cette solidarité selon des dispositions administratives de Bruxelles et de Strasbourg, bousculant les peuples dans leurs us et coutumes et tout ce qui, nécessaire à leur bien-être, leur est familier, que certains on cru qu’ils parviendraient malgré le ressentiment de ceux-ci, à finaliser une intégration européenne.
Mais il est clair maintenant avec ce Brexit qui devrait être l’occasion d’une réflexion approfondie à ce sujet, que ceci n’a pas fonctionné et il était prévisible que les citoyens d’une nation comme la Grande Bretagne qui a un moment dominé le monde, ne se résigneraient pas à ce que leur glorieuse nation ne se retrouve réduite au statut de petite province européenne, au même niveau que Malte ou la Lituanie, sous l’autorité de la bureaucratie bruxelloise.
Un danger identique concerne la France qui, pour n’avoir pas autant dominé le monde que la Grande Bretagne, a quant à elle copieusement dominé l’Europe des siècles durant, et qui ne se résignera jamais au statut de vassal d’une Europe sous domination allemande.
Ce sont donc les préoccupations des affairistes dont les hommes politiques constituent la clientèle, qui ont fait que ces considérations historiques et culturelles importantes, ont été à ce point négligées, et ce débat rejoint celui concernant la loi travail où là encore, des préoccupations mercantiles, prétendent s’imposer au mode de vie choisi par les Français, de sorte qu’il importe maintenant de s’y opposer à tout prix et pas tous les moyens…
Paris, le 24 juin 2016
Richard Pulvar