"L’attachement du président Préval à la fraude électorale est connu et bien documenté. À plusieurs reprises, il a avoué être devenu un expert en matière d’organisation de victoire électorale. Depuis qu’il a commencé sa carrière en décembre 1990, il a accumulé à son palmarès toute une liste de forfaitures dans lesquelles il affiche sa volonté de corruption généralisée des institutions. Son acte de brigandage le plus spectaculaire est la mascarade qu’il vient d’orchestrer à l’occasion des élections du 28 novembre 2010. Les manifestations spontanées survenues aux Cayes, Jacmel, Petit-Goâve, Desdunes, Port-au-Prince, Pétion-ville, Cap-Haitien, Acul du Nord, Trou du Nord, etc. mettent au grand jour le crime électoral perpétré avec sa complicité par le Conseil Électoral Provisoire (CEP). De nombreuses et massives irrégularités sont dénoncées dans plusieurs autres villes du pays. La communauté internationale feint toujours de ne pas comprendre que les Haïtiens disent NON aux diktats du CEP et à son effronterie à prétendre que tout s’est bien passé. La communauté internationale a encore une chance, en se mettant du côté du peuple haïtien, de faire en sorte que Préval ne puisse continuer à perpétrer ses méfaits. Sinon les Haïtiens le feront tout seuls. Dans le fil de la tradition des aïeux de 1804.
Rat-la pran nan pèlen
Dans ces évènements qui se déroulent en Haïti, c’est la communauté internationale qui en prend plein la figure dans son obstination à soutenir à tous les coups sa marionnette René Préval. L’opposition démocratique réalise une unité dans la lutte. Douze candidats, la main sur le cœur, écrivent la plus belle page de ce mois de novembre 2010. Quel coup de fouet à la conscience haïtienne ! Quelle élévation de l’âme haïtienne contre la continuité prévalienne ! Charles Henry Baker, Jean Henry Céant, Joseph Michel Martelly, Lesly Voltaire, Jacques Edouard Alexis, Wilson Jeudy, Josette Bijou, Erick Charles, Jean Chavannes Jeune, Garaudy Laguerre, Léon Jeune, Myrlande Hyppolite Manigat rentrent dans les annales historiques par la grande porte. Face à la dégénérescence du pouvoir, l’intelligence haïtienne se révèle dans toute sa beauté. La photo de famille des douze publiée dans le journal Le Nouvelliste montre tous les âges, sexes, couleurs, unis dans la lutte contre l’aberration soutenue par la communauté internationale. Cette dernière peut encore sauver les apparences en demandant officiellement à Préval de partir. Le rat Préval est pris à son propre piège électoral. Rat-la pran nan pèlen. Préval est un perdant qui ne peut plus défendre les intérêts des puissances qui l’ont maintenu au pouvoir.
Ce n’est pas aujourd’hui que Préval refuse de respecter la Constitution en matière électorale. On se rappelle son renvoi du Conseil Électoral Provisoire (CEP) dirigé par Jacques Bernard. Bien qu’il ait été élu président de la république par ledit CEP en 2006, sous les diktats des baigneurs de la piscine de l’hôtel Montana, le président Préval a voulu d’un CEP à ses ordres afin d’exercer une dictature qui ne dit pas son nom. Aussi a-t-il refusé de faire les élections du tiers du Sénat et de la Chambre des députés afin de se donner le monopole du pouvoir. De même, il a laissé en quelque sorte mourir la Cour de cassation qui par suite de son insouciance calculée n’a pas le nombre de neuf juges nécessaires pour siéger. En outre la Cour de cassation n’a même pas un président qui succéderait au président de la république en cas de vacance. La crise que nous vivons aujourd’hui est le résultat de cette politique aveugle dont les derniers soubresauts sont le remplacement des délégués départementaux et des vices délégués par des hommes totalement inféodés au président Préval ainsi que la désignation de candidats fantômes appelés à participer à la fraude électorale.
Un soulèvement général pour une révolution démocratique
Signalons tout de suite qu’il ne s’agit pas ici de contester au président Préval le droit d’appuyer tel ou tel candidat afin de s’assurer de la continuation de sa politique de vente à l’encan d’Haïti. Mais ce droit, il doit l’exercer selon les règles démocratiques et non pas en excluant ex-catedra ceux qui ne lui plaisent pas. Aucun président de la République n’a le droit de diriger Haïti comme s’il s’agissait de sa propriété privée. Aucune loi ne lui donne ce droit. Et s’il prétend se l’octroyer avec les forces étrangères qui le protègent, le peuple a aussi le droit de le chasser du pouvoir en utilisant tous les moyens à sa disposition. C’est de la perversion de la démocratie quand le président s’arroge le droit de vouloir changer la Constitution pour prolonger son mandat, de publier des décrets liquidant la souveraineté nationale, etc. Le mauvais chemin pris la bande à Préval ne demande pas moins qu’un soulèvement général, bref une révolution démocratique comme seule issue à la crise actuelle. Il faut un chambardement général du statu quo avec les sacrifices que cela exige.
Les luttes pour la liberté ne sont pas vaines. Pacifiques, violentes, actives, passives, ces luttes prennent différentes formes. Les peuples organisent leur résistance parfois sur des siècles. Quand l’ennemi est trop fort, les partisans organisent des retraits, font un pas en arrière pour ensuite faire deux pas en avant. On l’a vu en Haïti en 1803 où, après leur retrait de 1802, les anciens esclaves firent alliance avec d’autres couches de la population et même avec des soldats déserteurs accompagnant l’expédition Leclerc, pour relancer leur offensive et battre les troupes françaises. La politique, c’est la guerre. Il faut de l’organisation, des troupes de choc, des commandos, de l’artillerie lourde, du renseignement, etc. Certains utilisent le harcèlement, la guérilla tandis que d’autres utilisent les méthodes classiques avec les bombardements de la marine et de l’aviation avant le débarquement des troupes pour occuper le terrain. Bref, comme le souligne le Département de la Défense américaine, il y a des guerres de haute, moyenne et basse intensité. Les troupes étrangères sur le sol national sont la preuve qu’Haïti est en guerre.
Bravo pour la lucidité et le courage
En présentant six candidats à la présidence aux élections du 28 novembre 2010, le parti INITE s’était lancé dans une autre aventure pour tenter de rebâtir ce que René Préval a dilapidé au cours des quatre dernières années. La coalition qui a porté le président Préval au pouvoir en 2006 a volé en éclats. Des six candidats (Jacques Édouard Alexis, Jean Hector Anacassis, Yvon Neptune, Leslie Voltaire, Yves Cristallin et Jude Célestin) de la nébuleuse INITÉ, quatre ont pris leurs distances et se cherchent une base nouvelle pour entrer sur un terrain politique où les données ont changé. Jacques Édouard Alexis, Yvon Neptune et Leslie Voltaire ont largué les amarres et rejoint le camp de la liberté. Bravo pour leur lucidité et leur courage.
En effet, le ticket d’entrée n’est plus le même. Malgré un Conseil Électoral Provisoire (CEP) aux ordres et capable de fabriquer les résultats, la mobilisation de l’opinion publique nationale et internationale a fermé le robinet de la fraude et de la corruption. Au moins pour cette raison, la mobilisation dans les rues doit continuer sous toutes ses formes. Car sans une mobilisation permanente, la fraude électorale a encore des chances de triompher. Il importe d’attirer l’attention des medias internationaux sur la forfaiture électorale organisée en Haïti. Cela revient à rendre l’oppression haïtienne insupportable en l’exposant devant la conscience universelle. Mais ce sont les Haïtiens qui ont la première responsabilité dans cette affaire.
Même le mal, Préval le fait mal
Avec les six candidats qui étaient six balles dans le barillet de son revolver, le président Préval n’avait pas compris qu’il perdrait inévitablement en jouant à la roulette russe. Il a beau manier la démagogie avec habileté, ce que malheureusement notre créole nomme « intelligent », ses jours sont comptés. Croyant tenir par le CEP la recette du succès de son candidat , Préval est interpellé par la bataille pour le pouvoir dans son propre camp. Il a joué sa dernière carte. Une chance pour Haïti selon certains. La clé de l’énigme haïtienne selon d’autres. Un fait est clair : cela fait longtemps que Préval ne dirige rien. Il navigue à vue, sans boussole, et de surcroit, la barre du gouvernail tourne au gré du vent. On en veut pour preuve son erreur stratégique de ne pas faire les élections législatives quand elles devaient avoir lieu.
Même le mal, Préval le fait mal. Il a invalidé ainsi le processus de décharge au bénéfice de sa propre formation politique. Il a exigé que le CEP s’engage dans des manifestations grotesques de manipulation des conditions d’éligibilité pour permettre aux six candidats de l’INITÉ de participer à la course électorale en n’ayant pas à présenter des certificats de décharge. Et au fil de ses errances, il a insisté pour que la communauté internationale l’accompagne dans sa jubilation. Le président Préval refuse de comprendre qu’il est un article jetable. Surtout quand il prend des décisions extrêmes et embarrassantes pour ses protecteurs qui ne veulent pas se retrouver, comme lui, dans le gouffre de l’impuissance. La façade des faux-semblants du milieu diplomatique risque de se défaire à tout moment du tout au tout.
Depuis 25 ans, sous un air faussement débonnaire, René Préval a su cacher sa passion pour le pouvoir. Une passion maladive qui va jusqu’à cautionner le crime, comme le cas de Robert Marcello en atteste. Une obsession diabolique qui l’a portée à organiser des agressions armées contre de paisibles citoyens comme dans le cas de Mme. Cottin dans la nuit du 29 au 30 octobre 2010. Après avoir imposé une cure de minceur à la classe politique par une systématique politique électorale frauduleuse, le président Préval a versé dans le dumping en lançant des candidatures au-dessous de leurs prix de revient. Certains attribuent cette politique de dévalorisation et de mépris de la classe politique à un règlement de comptes du président avec la société haïtienne. Des blessures familiales et personnelles, dues au mépris que son père lui vouait pour sa piètre performance universitaire, l’auraient affecté profondément. C’est ce mépris de soi, un mépris indicible que le président Préval impose à la société. Un mépris doublé d’une psychose paranoïaque de ne pas se retrouver en prison, une fois qu’il ne sera plus président. Quels crimes a-t-il sur la conscience pour avoir si peur ?
Même combat en acceptant ou en refusant l’invitation du président
Le président Préval est confiant et a foncé dans le mur en toute confiance. Pour tenter de sauver ce qu’il craint pour sa peau, après son mandat. Dans sa vision des choses, les Haïtiens ne sont pas des kamikazes. Ils ne se mettent pas des ceintures d’explosifs à la manière des jihadistes pour se faire sauter en y entrainant leurs victimes. Ils sont plus dociles, victimes peut-être du dressage imposé par l’occupation américaine de 1915 à 1934. Mais ce dressage a des limites. Le président Préval semble ignorer ce dernier point. Aussi a-t-il cru pouvoir se situer au-dessus des lois, au-dessus de la Constitution, et agir en dictateur en prenant des décisions qui seraient sans appel. Son gouvernement peut construire le mur de l’inégalité en refusant d’appliquer un salaire minimum de 200 gourdes reflétant la hausse du coût de la vie. Préval renforce le mur de la perte de la souveraineté nationale. Le mur de la division. Le mur de la honte. Ses convocations et visites aux candidats pour tenter l’impossible n’ont rien changé. Aussi bien pour ceux qui ont accepté son invitation que pour ceux qui l’ont refusé. Ils participent tous du même combat. Les solutions bancales qui lui sont imposés par ses maitres pour faire taire les revendications populaires à la démocratie sont restées sans effet.
Le temps est venu d’inventer un autre avenir pour notre peuple afin qu’il ne préfère plus mourir dans des embarcations de fortune sur les mers agitées au lieu de se révolter contre ses oppresseurs. Il importe de libérer notre peuple prisonnier du tropisme du départ comme solution à son désespoir. L’analyse pour trouver du sens à cette complexité n’a rien de chimérique. Elle demeure la flamme de l’esprit pour de meilleurs lendemains. Pour faire revenir les sourires sur les visages meurtris par la catastrophe populiste.
En prenant la mesure de son outrecuidance, le président Préval doit réaliser maintenant à quel point son projet d’imposer Jude Célestin au pays était risqué et aléatoire. Partout, un mauvais sort a été réservé à son candidat. Au Cap-Haitien, les manifestants ont refusé qu’il dorme dans un hôtel de la ville. Aux Gonaïves, il a été chahuté. À la capitale il a reçu des jets de pierre des quartiers Korido Labou et Dèyé Simitiè, près du stade Sylvio Cator. La semaine dernière encore, les étudiants lui chantaient des funérailles symboliques et promènaient dans les rues de la capitale un cercueil à son effigie. Triste fin de règne pour un président qui hier encore pensait rentrer dans l’histoire comme l’unique président à remplir deux mandats au complet et à désigner son successeur !
Leslie Péan
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