lundi 5 juillet 2010

CHLORDECONE



CE QUE NOUS INSPIRENT LES REVELATIONS DE L’ETUDE « KARU PROSTATE ».

lundi 5 juillet 2010

Cela fait longtemps qu’on attendait les résultats de cette étude et ses conclusions. Au vu de ceux-ci, j’espère que les victimes du cancer de la prostate vont s’organiser et se constituer partie civile pour que justice leur soit rendue.

Les révélations de cette étude baptisée « Karu Prostate » appellent deux types de commentaires de notre part :

A. Les enseignements qui tapent à l’œil.

J’ai entendu la présentation faite sur les médias locaux par le Professeur BLANCHET, dont je salue au passage le cartésianisme et le dévouement aux principes issus du serment d’Hippocrate. Car si les pouvoirs publics ont su s’abriter derrière l’attente des résultats de cette étude, ils n’en ont pas été à l’origine, car c’est le Professeur BLANCHET lui-même, urologue de renommée internationale exerçant en Guadeloupe, qui a initié ses recherches, par pure curiosité scientifique, face à l’acuité de la problématique prostate dans nos régions. Je ne peux toutefois m’empêcher de penser que la publication des résultats de son étude a été différée, puis édulcorée afin d’éviter toute panique, tout alarmisme. Quoique l’on puisse dire, il est aujourd’hui évident que :

Le lien entre Chlordécone et Cancer de la Prostate est établi !
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Si les propos des chercheurs BLANCHET et MULTIGNER, tels qu’ils sont diffusés en Guadeloupe, sont de nature à minimiser l’impact de leurs révélations, l’article qu’ils ont publiés en anglais, dans un magazine scientifique jouissant d’une grande notoriété, ne laisse planer aucun doute :

Ce qui nous préoccupe, c’est que :

1. Un seuil d’indiction est désormais établi ; C’est à partir de la présence d’un microgramme (1µg/l) de chlordécone / litre de sang que le risque cancéreux est accru.
2. Dans l’étude « Karu Prostate », seulement 5% des personnes examinées étaient des ouvriers agricoles. Cela veut dire que la contamination ne se produit pas seulement par contact direct. Cela veut aussi dire que la chaîne alimentaire est contaminée (eaux, fruits et légumes).
3. Les révélations de « Karu Prostate » devraient couper cours à la campagne de désinformation orchestrée par les services de l’Etat qui voudraient nous faire croire que c’est parce que la grande majorité des Guadeloupéens est d’origine africaine, que nous serions prédisposés à développer le cancer de la prostate. Il est désormais établi qu’une enzyme dénommée « chlordécone réductase » produite par l’homme, peut induire une résistance au chlordécone. Chez les individus examinés dans l’étude « Karu Prostate », cette enzyme (chlordécone réductase) fonctionne bien. Ce n’est donc point un facteur génétique qui nous a affaiblis originellement et rendus définitivement vulnérables à ce pesticide.
4. Nous avons la confirmation du caractère lipophile du chlordécone, c’est-à-dire qu’il se fixe aux graisses ; Il conviendrait de ne pas se limiter au cancer de la prostate, mais au contraire, étendre le spectre des recherches à la sphère gastro-intestinale (foie, colon, pancréas,…). Une précédente étude « Hibiscus » avait déjà alerté sur les cas de femmes enceintes (présence de chlordécone dans le cordon ombilical). D’où la nécessité d’accentuer la surveillance des fœtus et d’une éventuelle rémanence de chlordécone dans les organismes des nouveaux nés.
5. L’étude laisserait maintenant à penser que le diabète de type 2, provoqué par la nourriture graisseuse, favoriserait le lien chlordécone/cancer de la prostate.

B.Que faire face à ces enseignements ?

Il ne s’agit pas de verser dans l’alarmisme, ni laisser accroire que la Guadeloupe ne peut plus être nourrie par l’agriculture locale et la pêche ; une telle assertion serait catastrophique pour notre économie. Certes, il ne s’agit pas de se taire, sous prétexte que l’économie importerait plus que la santé. Mais il n’est plus possible de faire l’autruche, de refuser de regarder le problème en face et s’abstenir encore de mettre en place :

* 1) Une vraie traçabilité comme l’exige la loi, afin que les consommateurs sachent exactement ce qu’ils achètent et ce dont ils se nourrissent. Cela suppose que soit dressée une cartographie sincère de la pollution au chlordécone, qui intègre le risque généré par les transferts d’eau issue de zones contaminées vers des régions soit disant « non-contaminées ». A ce stade, il convient de signaler que les turbulences météorologiques bouleversent les rivières et les cours d’eau, mettant à nue, en surface et ailleurs, des résidus de chlordécone blottis dans les sédiments. On ne peut donc se contenter de contrôles effectués en période d’étiage pour mesurer les taux de pollution au chlordécone.

* 2) Nous exigeons qu’il soit procédé au dépistage systématique de chlordécone et/ou de cancer de la prostate chez les hommes âgés de quarante ans et plus (40 ans et +) pour favoriser la guérison. Quant aux femmes, même si elles n’ont pas de prostate, on ne peut faire abstraction des risques qu’elles encourent, notamment par l’imprégnation du chlordécone aux parties graisseuses de l’organisme.

* 3) La Guadeloupe étant désormais reconnue comme leader en matière de cancer de la prostate, nos chercheurs doivent être aidés et leur indépendance préservée pour que notre pays Guadeloupe soit leader, non pas seulement en taux de cancer de la prostate, mais également dans la recherche scientifique en la matière. La Guadeloupe doit être leader mondial en matière de recherche sur le chlordécone et les pesticides en général.

* 4) Plan de recherche d’envergure et tous azimuts (sols, eau, fruits,…)

* 5) Plan de reconversion intense pour les agriculteurs vers des cultures et des modes opératoires compatibles avec la pollution des sols afin d’éviter toute spéculation foncière.

Il est temps que les guadeloupéens et martiniquais s’allient et se mobilisent vraiment pour que ce désastre, qui s’apparente à l’affaire du sang contaminé, soit traité à l’échelle qu’il convient, tant du point de vue sanitaire, que social et économique.

Pour ce qui est de la recherche des responsabilités, nous continuons résolument le suivi de la plainte avec constitution de partie civile que nous avons déposée au Pôle Santé du TGI de Paris des chefs d’« administration de substances nuisibles » et « mises en danger de la vie d’autrui », au nom de l’Union des Producteurs de la Guadeloupe (UPG) et l’Union Régionale des Consommateurs (URC) de la Guadeloupe. Pas à pas, nous démantelons le mensonge d’Etat et la Vérité s’impose jour après jour, malgré les souffrances qui nous ont déjà été infligées dans ce rude combat. Personnellement, je suis prêt à aller jusqu’au bout de cette quête de VÉRITÉ et de JUSTICE !

Harry Durimel

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