samedi 2 juillet 2011

Affaire DSK : victoire du storytelling sur la Justice et la Politique ?




On comprend le soulagement et « l'immense joie » des amis DSK. 


Comment d'ailleurs ne pas la partager tant on préfèrerait, et de loin, que Dominique Strauss-Kahn qui est une part de la France, une part de nous-mêmes dans le Monde, ne soit pas le violeur et le pervers décrit dans les gazettes de la planète et sur de si nombreux plateaux télés. Comment ne pas se réjouir du sourire d'Anne Sinclair et de Dominique Strauss-Kahn à la sortie du tribunal qui fait la Une de la Saison 2, pardon du journal Libération qui titre Saison 2.

Mais.

Mais malgré le nouvel effet de sidération, difficile d'échapper à la nauséeface au déferlement médiatique d'hier. Un déferlement amplifié par la concurrence que se font les médias traditionnels, le web et les réseaux sociaux.

Ces réseaux qui sont devenus pour nombre d'entre nous l'un des tuyaux par lesquelles nous arrivent l'information et où chacun d'entre-nous se sent obligé d'avoir un avis, tout le temps, en temps réel ...
Même quand l'information est rare, biaisée par la défense et / ou l'accusation qui n'ont pas le devoir de vérité de la presse et du journalisme juste celui de sauver leur client et leur cliente.

Nausée face à ces plaidoiries de trottoir invraisemblables où un avocat dépeint la femme de ménage autrefois présentée comme exemplaire en une blanchisseuse d'argent sale en cheville avec de la drogue tandis que l'autre rappelle les coups et blessures de sa cliente, y compris des « hématomes au vagin ». Coups et blessures sordides d'ailleurs disparus des JT français.

Voilà la nausée amplifiée par le torrent de boue médiatique laché sur Nafissatou Diallo, la femme de ménage de la suite 2806. Au point d'entendre en filigrane qu'une menteuse pourrait finalement être violée sans que justice lui soit rendue...

DSK a été enseveli dans un torrent de boue identique tandis que ses amis plaidaient la présomption d'innocence sans pouvoir être entendus dans l'assourdissant vacarme médiatique. On se souviendra ainsi longtemps des commentaires acerbes qui ont suivi la plaidoirie de Robert Badinter sur France Inter. L'ancien Ministre, à l'origine de l'abolition de la peine de mort en France, ne faisait pourtant que rappeler les bases du droit pénal, de la présomption d'innocence.

Ce matin, la présumée victime reste sans visage et c'est à son propos que l'on est forcé de rappeler qu'elle a droit aussi au respect de la présomption d'innocence.

Quant à ceux qui font des plans sur la comète, et ce au plus au niveau politique et médiatique, rappelons-leur tout de même que Dominique Strauss-Kahn encore dans le temps judiciaire et qu'en le ramenant dans le temps politique, ils risquent et de le desservir et de desservir la gauche, en ruinant les efforts faits pour découpler le judiciaire de la politique.
Car rien ne dit que l'épisode 3 ne viendra pas démentir les uns ou les autres.

La Justice et la Démocratie ne peuvent se réduire à un spectacle, à un storytelling fût-il aussi puissant et sidérant.



Richard Trois

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