Le Nouvel Obs l’a annoncé dans ses brèves : " On réfléchit du côté de
chez Aurélie FILIPETTI au repositionnement de la chaîne France Ô vers
l’outremer français avec l’appui du Ministère des Outremer… Le
ministère de la Culture s’aperçoit que l’Outremer français et ses
cultures peuvent s’afficher en métropole sur une chaîne de télévision.
C’est la Loi qui l’avait demandé. Une Loi que France Télévisions
s’était empressée d’oublier pour faire de France Ô un instrument, un Labô-ratoire télévisuel à la recherche d'audience.
Sous la houlette de Claude Esclatine, la chasse aux Marrons a bien eu
lieu depuis sa prise de fonction : exit les programmes valorisant les
Outre-mer, exil forcé en stations du dernier carré des cadres
ultramarins à Malakoff, lorsqu'ils ne sont pas tout simplement
"déchoukés" et placardisés. Après avoir fait place nette, le directeur
général de France Ô s’est répandu dans toute la presse pour célébrer
sa nouvelle chaîne aux accents soit disant métisses : » Etre la chaîne
de la diversité, au-delà du côté tarte à la crème et teintée de
repentance de cette notion, c’était un peu être une chaîne alibi.
France Ô l’a été trop longtemps. » Le changement de slogan signifie
surtout que France Ô ne serait plus la chaîne des Outre-mer. Ce qui a
suscité les vifs mécontentements des ultramarins. Et Claude
Esclatine de claironner: « Les résistances viennent de lobbys qui
tiennent dans une cabine téléphonique, nous avons changé les équipes,
il fallait évoluer, sortir d’une vision étriquée ».
Comprendre, une vision limitée à l’Outremer français, à ses onze
territoires, ses neuf stations de l’Atlantique Nord au Pacifique Sud
…Etriqué comme le monde !!
A la question de Libération du 15 janvier dernier : "Quant à savoir ce
qu’est France Ô, c’est coton. Ce « Ô », c’est sûr, c’est une vitrine
de l’outre-mer?: ». « Non!! », assène Claude Esclatine, directeur de
la chaîne publique, dernière née de France Télévisions. De la
diversité, alors ? « Non », répète Esclatine. (…) Baptisée RFO Sat à sa
naissance en 1998, la chaîne issue du réseau RFO était destinée aux
ultramarins de métropole. « On ne savait pas à qui on s’adressait »,
indique Esclatine. En 2005, RFO Sat devient France Ô et décroche un
canal sur la TNT en Ile-de-France : la voilà axée sur la diversité.
Son passage à la TNT nationale en juillet 2010 l’oblige à se repeindre
encore ; désormais, affirme Esclatine, ce sera « ouverture sur le
monde, métissage des cultures et cultures urbaines ». Le directeur de
l’antenne, Gilles Camouilly, parle "d'une mission militante" : il
s’agit de montrer l’enrichissement de la France par l’étranger ».Et
voilà l'ultramarin devenu l'inquiétant étranger de la République. Exit
donc ce sang impur !
Voilà pour la pensée profonde et déterminée du directeur qui croit ce
qu’il dit et dit ce qu’il croit…Enfin, pas tout à fait !
Car, tout récemment avec l'arrivée du nouveau pourvoir politique aux
affaires, après ses nombreuses visites dans les cabinets ministériels
et présidentiels, voici en substance le nouveau prêche de Claude
Esclatine : "France Ô doit- être la chaîne de l’Outremer français
!!''. Le voici devenu le sauveur de l'Outre-mer à la tête de la même
équipe qui ne voulait même pas en entendre parler: "L'Outre-mer ne
fait pas d'audience…ça ne concerne pas plus de 80 personnes en
Métropole et ça n'intéresse pas le grand public…ce n'est pas people".
La meilleure illustration de son mépris pour l'Outre-mer:
l'interdiction faite aux équipes de France Ô de faire une émission
spéciale en hommage à Edouard Glissant le jour de son décès. Une
claque pour les collaborateurs ultramarins, une insulte à la mémoire
d'un des plus grands écrivains français et la démonstration flagrante
de son inculture !
Comment cela ? Les mêmes personnes en six mois auraient-elles tourné
casaque ? Mais oui ! Et elles se dédouanent en clamant haut et fort,
que ce sont les technocrates de France Télévisions qui les ont obligé
à changer l'ADN de la chaîne pour en faire un machin sans corps, ni
âme que personne ne regarde. Mais où est donc passé le public
ultramarin? Il a très logiquement déserté une chaîne qui lui était
dédiée et qui ne lui ressemble plus. Les audiences que personne ne
communique stagnent à O,1 %.
Comment les personnels de France Ô peuvent-ils se retrouver dans ce
galimatias?…Comment cette chaîne peut-elle se sortir de cette spirale
infernale dans un contexte de crise?
Comment sauver cette chaîne qui n'est plus protégée par sa vocation
"ultramarine"? Devenue "urbaine et sans âme, elle est aujourd'hui
menacée de devenir une chaîne de dessins animés la journée et le soir
une réserve indienne aux programmes ultramarins.
Il faut surtout garder à l'esprit qu'en deux ans de fonctionnement,
les émissions "phares" de France Ô n'ont jamais accueilli d'artistes
ultramarins. Même le grand Jacob Desvarieux a été déclaré personna non
grata dans le Labô de Sébastien Folin. On comprend mieux pourquoi
l'animateur vedette de France Ô a déclaré dans son émission, il y a
quelques jours, qu'il détestait le zouk.
Pas un seul évènement ultramarin sportif retransmis dans son
intégralité alors que les sportifs ultramarins prouvent régulièrement
qu'ils représentent l'excellence du sport français et du sport
mondial.On leur préfère la sortie des bateaux du Vendée Globe diffusée
en direct sur toutes les chaînes d'infos et quasiment proposée à
toutes les chaînes de la TNT .
Disparition également de toutes les émissions produites en Outre-mer,
remplacées par des télénovélas Do Brazil de mauvaise qualités, mal
doublées, aux accents érotiques, affichant vestales affriolantes et
éphèbes aux cheveux luisants.
Résultat: France Ô a non seulement perdu son public ultramarin mais
aussi tous les téléspectateurs curieux et passionnés qui appréciaient
ces images venues de tous les océans, ces cultures et sociétés
françaises du bout du monde.
Le bilan de cette direction est sans appel! Faute d'avoir compris la
dimension culturelle, sociale, patrimoniale et stratégique de France Ô
et des chaînes d'Outre-mer 1ère, elle a détruit l'existant au lieu de
l'améliorer et de l'enrichir. Elle a cassé le fragile lien qui
existait avec les publics d'Outre-mer et a trahi la confiance des
politiques. Elle nous a mis en danger.
Echec sur toute la ligne: éditorial, ressources humaines et
industriel. Les stations se sont appauvries professionnellement,
laissées pour compte, à l'abandon avec des baisses d'audiences de 12 %
dans certaines. Elles s'inquiètent de l'avenir, d'autant qu'il se
murmure au plus haut sommet que certaines d'entre elles pourraient,
d'ici quelques mois, mettre la clef sous la porte pour éponger en
partie la dette de France Télévisions.
Des professionnels ultramarins indignés.
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