vendredi 17 septembre 2010

Haïti - Élections : La société civile en appelle à Ban Ki-moon

Le Collectif des organisations de la Société Civile salue la pertinence du dernier rapport sur la Mission des Nations Unies pour la Stabilisation en Haïti présenté au Conseil de Sécurité le premier septembre dernier et partage les inquiétudes du Secrétaire Général sur l’augmentation des actes criminels.

Le collectif souligne la volonté de Ban Ki-moon d’avoir des élections crédibles et légitimes à large participation populaire, cependant, il précise néanmoins que si ces élections ne sont pas crédibles et transparentes, la légitimité des nouveaux responsables de l’État sera mise à mal et ce serait, pour le pays et pour les Nations Unies, un échec cuisant.

Ce basant sur les informations du rapport et sur ses propres observations, le Collectif croit que la réalisation de ces élections nécessite le respect scrupuleux de la loi électorale et de la Constitution haïtienne de 1987 [ce qui, à ses yeux est loin d’être le cas]. Ajoutant dans une lettre ouverte au Secrétaire général [datée du 13 septembre 2010] « qu’il vaut mieux prendre le temps qu’il faut pour organiser un scrutin fiable et crédible plutôt que d’avoir une opération scandaleuse et génératrice de crise [...] afin que la Suprématie du Droit soit respectée ici en Haïti en matière électorale ».

À cette fin, le Collectif sollicite l’intervention du Secrétaire Général des Nations Unies afin de porter les autorités à réviser minutieusement le processus électoral en cours, condition sine qua non pour dissiper la méfiance, l’exclusion, la partialité, la dépendance, le déficit de crédibilité, la corruption qui caractérisent l’organisme électoral.

Lettre ouverte au Secrétaire Général des Nations Unies

Port-au-Prince, Le 13 Septembre 2010
Monsieur Ban Ki-moon
Secrétaire Général des Nations Unies
New-York

Monsieur le Secrétaire Général,

Des Organisations haïtiennes de la société civile réunies en Collectif, ont l’honneur de vous adresser la présente pour vous faire part de certaines de leurs préoccupations relatives au processus électoral en cours.

Le Collectif voudrait d’abord saluer la pertinence de votre dernier rapport en date, sur la Mission des Nations Unies pour la Stabilisation en Haïti. En effet, il partage vos inquiétudes concernant « l’augmentation du nombre d’actes criminels, de la quantité d’armes en circulation et de l’activité des gangs au cours des derniers mois », et les « troubles politiques possibles, associés à la période électorale » pouvant contribuer à « un environnement sécuritaire potentiellement explosif »

Votre rapport est parfaitement correct, quand il affirme que « la période électorale peut susciter de nouvelles menaces pour la stabilité en Haïti ». Ceci est particulièrement vrai quand on sait, comme vous le constatez vous-même, qu’il existe encore « 1.3 million de déplacés répartis dans 1,300 camps spontanés. » et que « la potentialité de troubles sociaux existe. »

Monsieur le Secrétaire Général, Le Collectif partage également vos inquiétudes relatives au  trafic de la drogue qui, selon vos propres termes, « sape les efforts de construction des institutions de l’Etat et de la stabilité politique, continue à infiltrer l’appareil d’Etat, exerce un effet corrosif sur les institutions préposées au maintien et à l’application de la loi, y compris la douane, des officiels de la justice et la Police ». Le Collectif craint fortement que l’argent du narcotrafic, de la corruption, de la contrebande et de tous les autres trafics illicites, avec leur cortège de violence armée, ne contrôle et ne domine la compétition électorale en préparation.

Par ailleurs, vous soulignez la nécessité d’élections crédibles et légitimes, d’une large participation populaire et d’un suivi rigoureux de la part de la communauté internationale.

Monsieur le Secrétaire Général, le Collectif croit que ces élections devraient constituer, pour la nation, le pivot autour duquel graviterait la réforme sérieuse de la gestion publique, de la justice en vue de parvenir à la réalisation des grands projets de reconstruction. Cependant, si ces élections ne sont pas crédibles et transparentes, la légitimité des nouveaux responsables de l’État sera mise à mal et ce serait, pour le pays et pour les Nations Unies, un échec cuisant.

Monsieur le Secrétaire Général, en se basant sur les indications de votre rapport ainsi que sur ses propres observations, le Collectif croit que la réalisation de ces élections nécessite le respect scrupuleux de la loi électorale et de la Constitution haïtienne de 1987. La question des opérations menées au niveau de l’Office National d’Identification (ONI) et du Centre de Tabulation, l’établissement des listes électorales après le séisme, les modalités d’application des sanctions, le non respect des délais prévus par la loi électorale, préoccupent particulièrement le Collectif. Il vaut mieux prendre le temps qu’il faut pour organiser un scrutin fiable et crédible plutôt que d’avoir une opération scandaleuse et génératrice de crise.

Monsieur le Secrétaire Général, l’examen des candidatures à la Présidence s’est déroulé dans l’irrespect total de la loi électorale et de la Constitution haïtienne de 1987. Il met en péril les efforts consentis par la communauté internationale et nationale dans le processus. Ce suivi rigoureux que vous préconisez concernant les différentes opérations électorales s’avère donc indispensable. Le Collectif est prêt à jouer sa partition et a besoin de votre appui et celui de la communauté internationale pour que la Suprérmatie du Droit soit respectée ici en Haïti en matière électorale pour que la Suprématie du Droit soit respectée ici en Haïti en matière électorale.

Monsieur le Secrétaire Général, le processus électoral, tel qu’il se présente aujourd’hui, n’inspire pas confiance. L’organisme électoral appelé à réaliser ces élections est décrié en raison de sa dépendance par rapport au pouvoir en place. Si aucune mesure n’est prise pour corriger cet état de chose, le scrutin programmé pour le 28 novembre 2010 plongera indubitablement le pays dans une crise politique et sociale sans précédent. Cette crise traduira l’échec de la communauté internationale dans ses efforts de stabilisation et de reconstruction du pays.

« Haïti se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins » affirme le Rapport « Kerry » du Sénat américain. Les Nations Unies sont donc appelées à jouer un rôle crucial à ce carrefour historique de la vie du peuple haïtien.

Monsieur le Secrétaire Général, le Collectif sollicite votre intervention afin de porter les autorités à réviser minutieusement le processus électoral en cours, condition sine qua non pour dissiper la méfiance, l’exclusion, la partialité, la dépendance, le déficit de crédibilité, la corruption caractérisant l’organisme électoral.

Dans ces sentiments, le Collectif vous prie d’agréer, Monsieur le Secrétaire Général, avec ses cordiales salutations, l’expression renouvelée de sa haute considération.


Suivent les signatures :

Initiative de la Société Civile (ISC) : Rosny Desroches
Conseil Haïtien des Acteurs Non Etatiques (CONHANE) : Edouard Paultre
Organisation des Patriotes Pour Ayiti (OPA) : Léopold Berlanger
Initiative Citoyenne (IC) : Jean Garry Denis
Centre Œcuménique des Droits de l’Homme (CEDH) : Jean-Claude Bajeux
Action Citoyenne : Bellegarde Berthony
Centre pour la Promotion des Droits Humains et de la Démocratie en Haiti (CEPRODHD) : Jn Gardy Théodore
Grand Front National des Etudiants Haïtiens. (GRAFNEH) : James Jacques
Office de Concertation pour le Développement (OCODE) : Dominique Joseph
MODODH : Alphonse Francis
Réseau National de défense des Droits Humains (RNDDH) : Pierre Espérance

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