Dans son bulletin de fin de journée du mercredi 19 mars, l’agence Sana parle d’une « opération spécifique » menée dans le quartier de Maysaloun au nord de la Vieille ville, et donc dans le centre-nord d’Alep, ayant infligé,
selon une des expressions consacrées, « de lourdes pertes » à la rébellion, notamment aux abords d’un institut d’enseignement professionnel. L’agence officielle syrienne évoque « nombre de mercenaires tués » et des « dizaines » de blessés.
Cette rhétorique triomphaliste immuable peut susciter un légitime scepticisme, ce conflit étant aussi celui de deux propagandes. Pour autant la vidéo – datée du 19 septembre – que nous mettons en ligne semble confirmer les affirmations de Sana : elle concerne Maysaloun, et montre effectivement un nombre très important de cadavres de rebelles. Incontestablement, l’ASL a été saignée dans ce secteur, qui n’est qu’un parmi une dizaine d’autres à Alep où l’armée affronte les poches de résistance insurgées.
Et, en effet, l’armée syrienne attaque et frappe sur plusieurs fronts. Ce 19 septembre, le quartier de Masaken al-Fardos, au sud de la ville, a vu lui aussi d’âpres combats, près du Centre culturel et de la mosquée d’Omar Ben al-Khatab et d’al-Fourn. Combats encore près de la Mosquée du quartier de Qastal Haram (centre d’Alep). Là aussi, Sana évoque de lourdes pertes dans les rangs ASL/salafistes, et des destructions de véhicules. Sept « terroristes » ont été tués à al-Jadideh (ou Jdaideh, centre-ouest).
Sana évoque encore ce 20 septembre, des combats aux abords de la mosquée al-Abbas à Hanano (est). L’OSDH de son côté, visiblement en panne de succès rebelles, se bornait à évoquer les bombardements des quartiers de Hanano, al-Chaar et Sakhour – trois quartiers limitrophes, à l’est de la ville -, ainsi que de plusieurs localités de la région nord d’Alep.
Cent afghans tués ?
Nous parlions de rhétorique triomphaliste : ce jeudi matin 20 septembre, Sana annonce la mort de « cent terroristes afghans« , tués par l »armée, le 19 septembre près de l’école Fida al-Arabi du quartier de Boustane al-Kasr (centre d’Alep, à l’ouest de la Vieille ville) : évidemment, le chiffre parait très élevé, et le fait que tous ces rebelles soient issus du même pays renforce l’incrédulité. Cela dit, même si le chiffre avancé par Sana est en la circonstance (peut-être) exagéré, il correspond quand même à quelque chose : certainement plusieurs dizaines de combattants islamistes, au moins en partie étranger, ont été mis hors de combat à Boustane al-Kasr ce 19 septembre. Exagérer l’ampleur d’un combat est une chose, l’inventer purement et simplement en est une autre, dont nous ne pensons pas les médias pro-gouvernementaux capables.
Sana fait état d’un incident plus inhabituel ; selon elle (qui s’appuie évidemment sur des sources militaires), des combats auraient éclaté à Baïdine (quartier d’Alep) entre rebelles syriens et étrangers, après que les syriens ont achevé des blessés étrangers dans d’autres quartiers d’Alep, sans doute pour ne pas les laisser tomber vivants aux mains de l’armée. Légende urbaine ? Propagande ? tout le monde sait qu’il y a des frictions entre salafistes, al-qaïdistes, ASL pur jus, syriens et étrangers : de là en s’entretuer dans un contexte aussi difficile pour eux….
Dans les environs d’Alep, à al-Sfeira, les soldats ont arrêté des activistes et saisi quantité d’armes, dont des fusils russes, des mitrailleuses, des RPG, des bombes, ainsi que des médicaments et différents matériels volés.Sana parle encore d’actions à Hreytane (5 kilomètres au nord d’Alep), à Manbej près de la frontière), à Sadjane. À Mareh (une trentaine de kilomètres au nord d’Alep) un dépôt d’armes et de munitions a été réduit en cendres (une frappe aérienne ?)
À l’est de Mayer (une dizaine de kilomètres au nord de Hreytane, sur la route stratégique de la Turquie), les forces armées revendiquent avoir détruit trois bus avec les terroristes et les armes à bord ainsi que deux pick-up dotés des « traditionnelles » mitrailleuses lourdes de type Douchka. Quinze autres véhicules de ce type ont été par ailleurs réduits en fumée sur les deux axes principaux au nord d’Alep, la route Alep/Al-Bab, et la route Alep/Azaz (ville située près de la frontière turque, à une quarantaine de kilomètres au nord d’Alep) : cela signifie que l’armée ne relâche pas la pression sur l’arrière-pays et les voies de ravitaillement de l’ASL, qui ne doit pas pouvoir acheminer beaucoup de secours aux insurgés assiégés dans Alep.
Et voici d’autres vidéos, instantanés de la lutte à Alep, qui renseignent bien mieux qu’un compte-rendu militaire sur la réalité que vivent les soldats – et les insurgés – depuis deux mois à Alep.
La première concerne les combats dans le quartier central de Midane, repris par l’armé voici 48 heures : on y voit un groupe d’ASL tiraillant depuis une petite ruelle perpendiculaire à un axe plus important. À un moment un char apparait au bout de la ruelle.. Et tire le premier : il semble que le groupe a été anéanti.
La première concerne les combats dans le quartier central de Midane, repris par l’armé voici 48 heures : on y voit un groupe d’ASL tiraillant depuis une petite ruelle perpendiculaire à un axe plus important. À un moment un char apparait au bout de la ruelle.. Et tire le premier : il semble que le groupe a été anéanti.
La suivante (19 septembre) montre un groupe abrité derrière des maisons dans un secteur non précisé (sauf peut-être dans le commentaire en arabe ; on entend des tirs de canon, et d’armes légères provenant sans doute de l’armée régulière ; un des ASL se promène sur la ligne de front en bavardant ; et puis un obus frappe le groupe :
Autre vidéo, plus générique, sur l’armée en action à Alep ; un blindé lourd manoeuvre avec précaution dans une petite rue, avant de prendre en enfilade avec son canon une ruelle perpendiculaire ::
Enfin, une page Facebook « dédiée » à Diya Matroud, responsable de la brigade ASL Al Furqan, tué par l’armée syrienne dans le quartier de Al Assali, au cours des dernières 48 heures semble-t-il. L’hécatombe rebelle à Alep est aussi une hécatombe de cadres.
-Damas :
Sana annonce la capture d’une centaine de « terroristes »dans le secteur du jardin des Pionniers dépendant du grand camp de réfugiés palestiniens et près d’un mosquée dépendant du camp de réfugiés voisin de Yarmouk, tous deux situés au nord immédiat de la localité d’al Hajar al Aswad, théâtre de nombreux incidents sanglants ces derniers jours. Sana parle de « purification » de cette localité, notamment du secteur de la station ferroviaire Aoudeh et de l’hôpital de Younes. Selon la source militaire citée par l’agence de presse syrienne, les terroristes ont utilisé lors de l’accrochage différentes sortes d’armes, dont des fusils à lunettes, les mitrailleuses Doshka, et des engins explosifs. Au moins un véhicule équipé d’une mitrailleuse Douchka a été détruit et ses occupants tués dans ces dernières opérations à al-Hajar al-Aswad. Rappelons qu’hier des combattants rebelles ont annoncé à leurs amis de l’OSDH leur « retrait » d’al-Hajar a-Aswad et d’Assali, reconnaissant leur échec.
Où l’on voit que l’action des bandes ASL est décidément limitée à la lisière sud de la capitale syrienne, entre banlieue et rase campagne.
Enfin, la rébellion frappe d’autres secteurs, mais sous la forme plus limitée du terrorisme pur : deux engins ont explosé aujourd’hui près de l’École féminine des Arts dans la ville de Qudsaya (banlieue nord-ouest de Damas), faisant nombre de blessés parmi les citoyens, « mais aucune des étudiantes de l’école », d’après une source officielle. La source a souligné au correspondant de Sana que le premier engin a explosé près de l’école et l’autre à 200 mètres du premier.
Sana annonce encore qu’une unité des forces armées a libéré sept personnes enlevées par les groupes terroristes près de l’usine des réfrigérateurs Barada dans la région entre Sbeineh et al-Issali dans l’extrême banlieue sud-ouest de Damas. Une source militaire évoque d’ailleurs la fuite des rebelles devant l’offensive de l’armée, dans ce secteur d’al-Bouayyda et de Sbeineh. Des sources gouvernementales annoncent qu’une opération militaire a permis de dégager quatre employés de la centrale électrique d’al-Hajar al-Aswad, assiégés par les rebelles depuis cinq jours.
Dans le gouvernorat de Damas, la ville touristique de Zabadani, adossée à la frontière libanaise dans un secteur montagneux à une trentaine de kilomètres au nord-ouest de la capitale, fait (un peu) reparler d’elle : l’armée y a eu un accrochage avec une bande. Zabadani avait été un temps, au tout début de cette année, occupée par l’ASL, avant d’être reprise par l’armée à la mi-février.
-Homs :
À Homs, une unité de nos forces armées a tué, dans une opération spécifique, des dizaines de terroristes et détruit un entrepôt de munitions à Bab Houd. Ce petit quartier – peut-être 5 000 habitants avant les événements – situé dans le centre-ville à l’ouest immédiat du Souk et du centre historique semble concentrer les dernières forces de l’insurrection locale, qui certes ne fait plus beaucoup parler d’elle.
-Deraa :
Sana indique que, se basant sur des renseignements fournis par des habitants, les « services spécialisés » ont ratissé le repaires et les QG de groupes terroristes dans le village de Ghabaghib de Deraa, multipliant les arrestations dans leurs rangs ainsi que les saisies d’armes. Une source officielle précise que nombre de terroristes se sont rendus aux autorités, alors que d’autres ont essayé de résister avant d’être appréhendés.
-Ar Raqqah :
Comme nous le disions hier, un groupe rebelle a pris le contrôle du poste-frontière de Talabyad (ou Tall al- Abyad), après avoir massacré une vingtaine de soldats non loin de là à Beer al-Acheq (voir notre article « Un nouveau crime des protégés de Hollande et Fabius », mis en ligne le 18 septembre 2012). Le poste frontière de Tall al-Abyad est situé à une centaine de kilomètres au nord de Raqqah ; c’était semble-t-il un point de passage entre la Syrie e la Turquie assez peu fréquenté, se situant très à l’est de l’axe principal Damas/Alep/Turquie.
Voici à ce sujet une autre vidéo de la brigade salafiste al-Tawhid qui proclame la « libération du rond-point d’al-Rayssi à Talabyad le mardi 18 septembre » assurant que « l’ASL se promène dans les rues de la ville » ; on peut lire en effet sur certaines voitures la mention « liwaa al-tawhid » ; on voit peut-être une cinquantaine de rebelles autour d’une placette avec une fontaine sur laquelle est hissé le drapeau ASL ; on notera une fois de plus le vocabulaire limité du commentateur, qui lance ses « Allah o akbar ! » toutes les 3 secondes environ :
Quoi qu’il en soit, un média pro-ASL comme le quotidien libanais L’Orient-Le Jour indique dans un article en date du mercredi 19 septembre que « d’intenses combats ont éclaté mardi après-midi entre l’armée syrienne et les rebelles de l’Armée syrienne libre (ASL) qui tentaient de prendre le contrôle du poste frontière de Tall al-Abyad ». Le quotidien pro-Hariri et anti-syrien ajoute avoir eu la confirmation que les forces du régime bombardaient le village. Le séjour des salafistes à Tall l-Abyad sera sans doute de courte durée, et certainement pas de tout repos.
Une autre vidéo sur l’ASL à Tall al-Abyad (19 septembre), sans doute signée du même « caméraman » (on reconnait sa voix et ses « Allah o akbar ! » maladifs) : cette fois, on avance vers le poste-frontière ; un des bâtiments de la douane a souffert ; on voit un pick-up -mitrailleuse et quelques dizaines d’insurgés ; en face, à quelques mètres, le poste turc est silencieux, et la frontière fermée ;
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