mardi 20 avril 2010

La gouverneure générale livre un vibrant plaidoyer pour les femmes africaines


OTTAWA, ONTARIO--(Marketwire - 20 avril 2010) -

Son Excellence la très honorable Michaëlle Jean, gouverneure générale du Canada, a livré un vibrant plaidoyer hier sur l'important rôle que doivent jouer les femmes africaines pour l'avenir de l'Afrique devant l'Assemblée nationale et le Sénat de la République démocratique du Congo (RDC).

« Il n'y a pas de démocratisation ni d'avancement possible sans la reconnaissance du rôle des femmes dans le développement des sociétés et sans l'assurance que leur intégrité physique et psychologique est protégée », a déclaré Michaëlle Jean.

« Tous les combats que nous menons pour le respect des droits des femmes sont, à mon sens, purement et simplement, une affirmation de la dignité humaine. C'est donc en misant ensemble sur les forces collectives des femmes, et des hommes qui croient en leur égalité, que nous triompherons des forces de la destruction. »

En après-midi, toujours hier, Son Excellence a visité la clinique Ngaliema. Ce centre de santé reçoit l'appui de l'Agence canadienne de développement international (ACDI) pour la formation des infirmières accoucheuses et la professionnalisation de leur pratique.

La gouverneure générale termine sa visite en RDC aujourd'hui en se rendant à Goma, dans le nord-est du Congo, pour rencontrer des survivantes de violences sexuelles et des intervenantes et intervenants qui leur viennent en aide. Cette visite permettra à la gouverneure générale de saluer les Canadiennes et les Canadiens qui œuvrent au sein des ONG présentes dans cette zone, ainsi que les membres des Forces canadiennes engagés dans la MONUC, la force de maintien de la paix des Nations-Unies en RDC.

Les membres du public sont invités à suivre le déroulement de la visite d'État en RDC. Les discours que prononcera la gouverneure générale et des photos seront affichés sur www.gg.ca. Les blogues de Son Excellence et des délégués qui l'accompagnent seront mis en ligne sur www.ecoutedescitoyens.gg.ca.

Discours de la gouverneure générale devant l'Assemblée nationale et le Sénat de la RDC :

SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS

Je suis ravie de cette occasion qui m'est donnée de prendre la parole devant cette auguste assemblée et de partager avec vous quelques réflexions qui m'apparaissent vitales pour l'avenir de cette nouvelle Afrique où la démocratie cherche à s'enraciner.

C'est la troisième fois que je viens en Afrique, et je constate qu'un vent de changement souffle sur le continent de mes ancêtres.

En 2006, lors de mes premières visites d'État à titre de gouverneur général du Canada, qui m'ont conduite en Algérie, au Mali, au Ghana, en Afrique du Sud et au Maroc, j'ai voulu identifier les forces qui représentaient l'Afrique de tous les espoirs.

Au cœur même de ces espoirs, il y a la femme africaine.

L'an dernier, au Liberia, à l'invitation de la première femme du continent africain à être élue à la tête d'un État, Son Excellence Ellen Johnson-Sirleaf, j'ai participé au Colloque international sur le renforcement des capacités des femmes, le développement du leadership et de la sécurité.

Partout, sur mon passage, du nord au sud, et de l'ouest au cœur, j'ai vu de mes yeux vu les Africaines porter le continent sur leurs épaules, et je suis convaincue que c'est par elles que passera la renaissance de l'Afrique.

Donnez des moyens aux femmes de vivre en sécurité et dans la dignité.

Donnez des moyens aux femmes d'agir.

Et, comme j'aime à le répéter, vous verrez reculer la violence, la corruption, la pauvreté, la maladie, l'injustice, l'analphabétisme.

C'est en donnant des moyens aux femmes que l'on donne aux familles, aux communautés, aux pays auxquels elles appartiennent des chances d'une vie meilleure et plus juste.

Faut-il rappeler que dans la région des Grands Lacs, la voix des femmes a transcendé les frontières, les divisions, la cupidité, pour rétablir le dialogue et contrer la haine.

Il m'importe de leur rendre hommage aujourd'hui devant vous.

Je le fais avec d'autant plus de bonheur et d'insistance que la femme qui se tient devant vous a consacré plusieurs années de sa vie à combattre l'exclusion et la violence faite aux femmes et aux filles car, pour être éminemment condamnable, ce fléau sociétal n'est pas exclusif à une seule région du monde.

Je suis aussi une femme noire des Amériques, née dans l'un de ses pays les plus pauvres, Haïti, et dont les racines plongent dans ce continent africain d'où mes ancêtres ont été arrachés pour être réduits à l'esclavage.

Je suis aussi la mère d'une petite fille de dix ans.

Et je suis gouverneure générale d'un pays de tous les possibles, le Canada, qui veut croire en vos espoirs de stabilité, de paix, de justice et de prospérité.

C'est donc à tous ces titres que je m'adresse à vous aujourd'hui, distingués membres de l'Assemblée nationale et du Sénat de la République démocratique du Congo.

Sachez que l'une des valeurs chères aux Canadiennes et aux Canadiens est l'égalité de la femme et de l'homme, et nous nous réjouissons que la liberté de la femme, son droit à l'éducation et sa participation au pouvoir politique soient reconnus formellement dans la Constitution de votre pays.

Nous applaudissons également aux efforts déployés pour promouvoir les droits de la femme congolaise dans vos programmes et plans nationaux.

Comme vous, nous estimons qu'il n'y a pas de démocratisation ni d'avancement possible sans la reconnaissance du rôle des femmes dans le développement des sociétés et sans l'assurance que leur intégrité physique et psychologique est protégée.

Or, vous le savez mieux que nous, il se vit dans plusieurs régions du pays une crise dont le degré d'horreur est inouï.

Une crise qui piège les femmes et les enfants, et qui suscite partout de vives inquiétudes.

Malgré une volonté ferme d'en finir avec les années de conflits, qui ont laissé des séquelles profondes dans la population, les massacres et les crimes se poursuivent en certains points chauds du territoire congolais.

Cette recrudescence de la violence constitue un terreau fertile pour la violation des droits humains les plus fondamentaux, notamment ceux des plus vulnérables, c'est-à-dire les femmes et les enfants à la merci des groupes armés.

Comme en fait foi le constat du Rapporteur spécial des Nations unies sur les exécutions extrajudiciaires, que vous avez accueilli chez vous en octobre dernier : « Le fait, affirme-t-il, est que le nombre et la gravité des attaques ne s'estompent pas et semblent même s'aggraver. La violence sexuelle à grande échelle continue de sévir… »

On parle, dans certains cas, de graves violations du droit international humanitaire, voire de « crime contre l'humanité », rapportait le mois dernier l'Organisation des Nations unies.

La République démocratique du Congo demeure, hélas, l'un des pays les plus dangereux où naître.

Encore plus dangereux si l'on est une fillette.

Nous toutes et tous ici présents savons que l'ampleur des violences sexuelles atteint des proportions endémiques.

Qu'elles sont utilisées comme armes de guerre pour humilier les femmes, voire les détruire sans scrupules.

Qu'elles sont en partie responsables de la propagation de maladies comme le VIH/SIDA, dont le coût social est incommensurable.

Que les enfants et les jeunes en sont aussi victimes, eux qui représentent plus de la moitié de la population, eux sur qui se fonde l'espoir d'une République démocratique du Congo enfin pacifiée.

Dans votre Constitution, il est reconnu que toute violence sexuelle faite sur toute personne, dans l'intention de déstabiliser, de disloquer une famille et de faire disparaître tout un peuple, représente un crime contre l'humanité et est passible de condamnation.

Comme vous, chers amis, le Canada condamne ces violences qu'il juge inacceptables, indignes, déshumanisantes.

Aux souffrances et au courage de toutes les victimes, nous n'avons d'autre choix que de répondre par une plus grande solidarité et une meilleure coopération.

Solidarité et coopération avec vous, qui avez engagé votre pays sur la voie lumineuse de la démocratie, et qui avez à cœur de le faire progresser.

Avec la communauté internationale qui ne peut ignorer cette tragédie qui se déroule au cœur même de l'Afrique, son cœur battant, trop souvent en toute impunité.

Avec les organismes qui œuvrent sur le terrain auprès des victimes de violences sexuelles et auxquels le Canada apporte son appui.

Avec les femmes congolaises, dont nous saluons le courage, et qui aspirent à plus de sécurité, de justice, d'égalité et de possibilités pour le plus grand nombre.

C'est ce qu'affirmait sans détour la militante reconnue de la lutte contre les violences sexuelles, Bernadette Ntumba, lors de son passage au Canada, l'an dernier : « Les choses vont changer, a-t-elle dit, si tout le monde s'implique : la société civile, le gouvernement et la communauté internationale. »

À cet égard, je me réjouis que, dans le programme d'action régional de 2010-2014 sur les questions humanitaires et sociales de la Conférence internationale sur la Région des Grands Lacs, vous vous soyez engagés, en tant qu'État membre, à « prévenir, éradiquer et punir toutes les formes de violence, d'exploitation et d'abus contre les femmes, les filles et les jeunes garçons et, ce faisant, à fournir l'assistance aux survivants ».

Il va sans dire que ces problématiques font d'ailleurs l'objet d'une mobilisation qui transcende les cultures, les frontières et les sexes, non seulement ici, en République démocratique du Congo, mais à l'échelle du continent et de la planète.

Certes, il s'agit là d'un gage d'espoir sur lequel nous devons miser.

Tous les combats que nous menons pour le respect des droits des femmes sont, à mon sens, purement et simplement, une affirmation de la dignité humaine.

C'est donc en misant ensemble sur les forces collectives des femmes, et des hommes qui croient en leur égalité, que nous triompherons des forces de la destruction.

C'est, du moins, le vœu que je formule devant vous, en toute fraternité, en cette année du cinquantième anniversaire de l'indépendance de la République démocratique du Congo.

Je suis impatiente d'aller à la rencontre des populations et de la société civile congolaises, notamment dans la région de Goma, pour entendre et voir quelles sont les solutions mises de l'avant pour en finir une fois pour toute avec cette violence inacceptable parce que dévastatrice. Il y va de la paix que nous souhaitons ardemment pour le Congo.

Je vous remercie chaleureusement de votre écoute et souhaite de tout cœur paix, bonheur et prospérité à toutes les Congolaises et à tous les Congolais.

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