"(Ottawa) Haïti, vos amis commencent à s'impatienter. J'espère qu'un responsable politique quelconque, à Port-au-Prince, avait l'oeil sur la visite de Hillary Clinton à Wakefield, dans une auberge québécoise à 30 minutes du parlement canadien, hier.
Et j'espère que les membres de l'élite haïtienne, qui ignoraient les besoins de la population même avant le tremblement de terre de janvier dernier, liront la déclaration finale de cette rencontre entre Mme Clinton et ses homologues du Mexique, Patricia Espinosa, et du Canada, Lawrence Cannon.
Nul besoin de lire entre les lignes, ce qui est écrit noir sur blanc et les paroles prononcées clairement donnent l'heure juste : «Les acteurs de la scène politique haïtienne doivent s'acquitter de leurs responsabilités», leur a dit M. Cannon.
Et cela, ils ne le font pas plus aujourd'hui que l'an dernier.
L'aide internationale tarde à se rendre aux principaux intéressés, sur le terrain. Pendant quelques mois, les pays amis d'Haïti ont avalisé le thème du respect de la souveraineté de ce pays même après la catastrophe.
Ceux qui ont suivi la conférence des donateurs à Montréal, ce printemps, se montraient abasourdis devant cette exigence ferme de ce qui restait du gouvernement local, et de l'absolu manque de résistance de la communauté internationale face à ces velléités.
Il était déjà visible que les autorités légales n'avaient aucune capacité d'agir. Mais il fallait respecter le processus politique normal et croire en la possibilité d'élections honnêtes dans le cadre du calendrier prévu.
L'expérience est concluante, les élections ont donné un improbable deuxième tour dont fait partie le protégé du président sortant René Préval, totalement déconsidéré dans son pays.
Le Canada offre ses services pour vérifier un recomptage électoral. Les États-Unis aussi, mais y croit-on vraiment, à ce recomptage?
Les observateurs internationaux tout comme les journalistes sur le terrain ont croisé des dizaines d'électeurs incapables de voter, et vu des urnes bourrées de votes. Recompter les mêmes votes ne servira à rien, la fraude a été commise en amont.
Mme Clinton a dressé un portrait fort sombre de la situation, alimenté peut-être par les comptes rendus personnalisés de son mari, l'ancien président Bill Clinton, actuellement émissaire spécial des Nations unies pour Haïti.
Défis humanitaires, défis économiques, défis électoraux aigus, rien ne manquait de sa description.
Elle a même ajouté qu'il était difficile de choisir une priorité entre tous ces défis et manifesté sa frustration constante devant le manque de réformes cohérentes de la part du gouvernement de Port-au-Prince.
«Même affaibli, le gouvernement doit faire plus d'efforts, a-t-elle dit. Nous attendons plus de sa part.»
Mais pas question encore de couper l'aide comme le suggère un influent sénateur démocrate, Patrick Leahy. «Nous ne voulons pas punir le peuple haïtien», a-t-elle répliqué.
Mais attention, le sénateur Leahy représente un important secteur de l'opinion et soutient justement par principe les programmes d'aide internationale. Si un vent mauvais souffle de ce côté, les Haïtiens ont matière à s'inquiéter.
Pas de progrès économique dans ce pays sans stabilité gouvernementale, a lancé M. Cannon après la rencontre. La communauté internationale ne peut pas tout faire en Haïti.
L'élection devait relancer le pays, en théorie. Dans les faits, elle l'a enfoncé un peu plus dans la misère.
Le mot tutelle fait partie des tabous dans ce dossier. Mais elle vaudrait mieux que la rupture et l'abandon, et la saison de la chasse aux idées pour sortir les Haïtiens de la dèche reste ouverte, pour le moment.
– Envoyé à l'aide de la barre d'outils Google"
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