Les Etats-Unis observent la présidentielle française avec un intérêt teinté d'appréhension, vu les positions affichées par François Hollande sur l'Afghanistan, après avoir entretenu des relations qualifiées «d'excellentes» avec Nicolas Sarkozy malgré des désaccords de fond.
Officiellement, Washington se garde de prendre parti dans la course qui oppose le président sortant et son adversaire socialiste pour diriger un pays doté d'un droit de veto au Conseil de sécurité de l'Onu et dont 3.600 soldats restent déployés aux côtés des GI's en Afghanistan.
«La France est un grand, grand allié des Etats-Unis et le restera», a affirmé Jay Carney, porte-parole du président Barack Obama. Il a refusé de «préjuger des résultats de l'élection française» et de leurs conséquences sur la relation transatlantique.
Mercredi, Hollande a quant à lui évoqué une future relation de «confiance avec la direction actuelle des Etats-Unis», malgré des «différences d'approche sur l'Otan et sur l'Afghanistan». Ce dernier dossier pourrait provoquer des frictions entre un nouveau gouvernement socialiste à Paris et l'Administration Obama, qui a fixé à 2014 l'échéance d'un transfert des responsabilités aux forces afghanes. Hollande, favori des sondages, a, en effet, promis, sauf «impossibilité matérielle», un retrait des troupes françaises d'ici à la fin de l'année.
«François Hollande a annoncé qu'il entamerait le retrait dès son arrivée s'il était élu, et qu'il terminerait ce retrait en 2012, donc deux ans avant la décision collective, et ça, ça pose problème pour l'Administration Obama», observe Justin Vaïsse, chercheur à l'Institut Brookings de Washington. En cas de victoire le 6 mai au soir, Hollande devrait répondre immédiatement à ces inquiétudes. Moins d'une semaine après son éventuelle prise de fonctions, deux sommets l'attendraient aux Etats-Unis: le G8 à Camp David et l'Otan à Chicago.
Charles Kupchan, expert au Council of Foreign Relations, y prédit «des pressions pour faire en sorte que la France reste dans le rang des alliés de l'Otan».
Encore faut-il noter que Hollande ne semble pas vouloir revenir sur un des acquis importants de ces cinq dernières années : le retour de la France dans le commandement intégré de l'Otan. Un symbole de la rupture de Sarkozy avec l'héritage gaullien de refus d'un alignement avec les Etats-Unis.
Selon Vaïsse, «les émissaires de François Hollande ici à Washington ont délivré un message (...) qui était : ‘nous n'avons pas été d'accord avec la décision de réintégration complète telle qu'elle a été conduite par le Président Sarkozy (...) mais en même temps nous n'entendons pas renverser cette décision’».
«Evidemment, le Président Sarkozy a été un soutien extraordinaire de l'Otan et un partenaire proche sur des dossiers comme la Libye (...) et nous sommes certains de conserver cet élan à l'avenir», a expliqué Ben Rhodes, conseiller adjoint de sécurité nationale de Obama, en soulignant que l'Otan «a traversé de nombreuses décennies de couleurs politiques différentes de ses Etats-membres». Malgré de réels désaccords sur le fond, en particulier sur la relance de la croissance après la crise de 2008 et le dossier israélo-palestinien, Obama et Sarkozy ont vanté ces derniers mois l'efficacité de leur coopération.
Signe de cette entente après quelques accrocs formels en 2009, Obama avait consenti à participer à un entretien télévisé commun avec son homologue français, qu'il avait couvert d'éloges à l'issue du G20 à Cannes (France) début novembre 2011.
«Nicolas et moi, nous entretenons d'excellentes relations, nous les avons toujours eues. Cela résulte du fait que nous partageons des responsabilités, nous menons les mêmes combats dans une époque très difficile», avait affirmé Obama, en qualifiant Sarkozy de «partenaire ouvert, qui travaille beaucoup, qui a beaucoup d'énergie».
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire