Deux ans après le séisme qui fit au moins 200.000 morts, Haïti dépend toujours de l'aide internationale.
Le Champ de Mars n'a toujours pas retrouvé son visage. Deux après le séisme, qui a ravagé Haïti ensevelissant 200.000 personnes, le cœur dePort-au-Prince demeure un vaste camp de toile où s'entassent des milliers de sans-abri. Au loin, le palais présidentiel gît toujours avachi, comme un symbole d'une reconstruction qui tarde.
L'île manque encore de tout et les urgences s'accumulent. La première demeure le logement. Le tremblement de terre avait jeté à la rue 1,5 million de personnes. Il reste aujourd'hui 500.000 sinistrés, qui survivent sans eau courante, sans électricité, sans soins. Leur situation est aussi difficile qu'aux premiers jours.
Le système de santé, d'éducation et parfois même de sécurité dépendent encore entièrement des organisations internationales, au point qu'Haïti a glané le surnom de République des ONG.
«L'État n'a pas les moyens d'intervenir»
Ainsi Médecins du monde a assuré en 2011 plus de 250.000 consultations à Port-au-Prince. Action contre la faim a, pour sa part, apporté de l'aide à 900.000 familles. «Maintenant, nos actions sont concentrées dans les quartiers d'origine des sans-abri, mais cela complique nos interventions auprès des familles nécessiteuses, car il n'y a pas d'espaces appropriés», observe Lucille Grosjean, directrice locale d'ACF.
La liste des actions des ONG serait trop longue pour être dressée. «Nous ne sommes pas encore prêts à les remplacer, reconnaît Hervey Day, le ministre de la Coopération haïtien. Elles répondent à un déficit étatique et apportent des services dans un contexte où l'État n'a pas les moyens d'intervenir.»
L'État haïtien n'est cependant pas resté totalement les bras ballants. Les rues ont été déblayées et 10 millions de m3 de gravats enlevés. «C'est vrai que les choses tardent. Il n'y a pas eu d'avancée spectaculaire comme des grandes reconstructions mais des choses discrètes ont été faites. Je me refuse à être pessimiste», assure Francis Charhon, le directeur général de la Fondation de France.
La Fondation, qui a mobilisé 33 millions d'euros d'aide, met ainsi en avant la réouverture d'écoles ou le soutien apporté aux paysans dans les campagnes pour retrouver des semis et relancer l'agriculture.
Impatience de la population
Médecins sans frontières (MSF) tempère aussi ses critiques. Si la situation sanitaire est mauvaise, s'il n'existe que quatre hôpitaux dans la capitale contre un pour 150.000 habitants nécessaires selon les critères internationaux, le constat n'est pas nouveau. «C'est vrai que Port-au-Prince est encore ravagé. Mais il ne faut pas oublier qu'avant le séisme, cette ville qui est passée de 300.000 habitants à trois millions en vingt ans, était déjà misérable», résume un observateur.
Mais la communauté internationale, qui s'était fortement mobilisée, transférant 5,6 milliards de dollars d'aide d'urgence auxquels se sont déjà ajoutés 2,4 milliards pour la reconstruction, commence à exiger des résultats. Une impatience qui gagne désormais la population.
Le gouvernement n'ignore rien de ces critiques. Le premier ministre, Garry Conille, a promis la mise en chantier d'une vingtaine de bâtiments pour reloger l'administration publique ainsi que des centaines de milliers de personnes. D'aucuns restent dubitatifs, pointant les clivages et les querelles politiques qui entravent les décisions.
Tanguy Berthemet
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