La Banque centrale européenne a offert un cadeau de Noël à ses collègues banquiers : l'offre illimitée de crédit aux banques pendant trois ans, avec des taux d'intérêt de 1%. La banque peut prêter cet argent – avec des taux d'intérêt bien plus élevés – aux gouvernements, se remplissant les poches aux dépens du contribuable. La reprise de ces transactions scandaleuses s'accompagne de nouveaux cadeaux : réduction des réserves obligatoires (que la banque doit conserver en sa possession) et assouplissement des garanties bancaires auprès de la BCE ; la banque peut se débarrasser auprès de la BCE de tous les « emprunts toxiques » sans aucune valeur. En un seul jour, plus de 500 banques ont amassé près de 500 milliards d'euros. Un économiste cité par le Telegraph déclare que le montant emprunté « est équivalent à près d'1,5 fois les titres de la dette que l'Espagne et l'Italie devront émettre en 2012 ». Pour les États, l'argent ne s'obtient qu'à des taux usuraires, au prix du sang, de la sueur et des larmes. Pour les banques, l'argent comme le champagne coule à flots. Comme il fallait s'y attendre, les bourses et les marchés « à risque » ont connu une journée d'« euphorie ».
Si le Noël de l'UE pour les banquiers est un jackpot, pour les peuples, il a un goût bien plus amer. Les portugais le savent bien. Et la Commission européenne aussi : selon le Financial Times, « une nouvelle étude commanditée par la Commission européenne (…) affirme que les mesures d'austérité mises en œuvre au Portugal en 2010 ont été 'clairement régressives', de telle sorte que les familles les plus pauvres ont vu leurs revenus diminuer plus fortement, en proportion, que ceux des ménages les plus aisés ». Un graphique qui accompagne la nouvelle indique que dans les familles les plus pauvres avec des enfants, la perte a été de l'ordre de 9%. Mais ils en veulent encore plus. Des grecs martyrisés, ils exigent des dizaines de milliers de suppressions d'emploi dans le secteur public, de nouvelles baisses de salaires et des privatisations. En Irlande – où les salaires des fonctionnaires ont été diminués en moyenne de 14% – il y aura de nouvelles « coupes budgétaires de 3,8 milliards d'euros – de nouvelles restructurations dans le secteur public, des coupes dans les allocations familiales, des frais de scolarité bien plus élevés, et une augmentation de la TVA pour atteindre la barre des 23% ». La chancelière Merkel a salué l'Irlande comme un « magnifique exemple » à suivre pour sortir de la crise. Mais les chiffres les plus récentes indiquent une contraction de 1,9% du PIB au 3ème trimestre (12,5% depuis le début de la crise) et un chômage qui pointe à 14,3%.
Ceux qui croient dans la propagande de l'UE n'arrivent pas à concevoir comment on peut s'entêter dans des politiques aussi désastreuses. C'est simple. Il y a des gens qui réalisent leurs profits sur le dos de la misère des peuples. La lutte des classes, loin d'être une chose du passé, n'a jamais été aussi intense sur le sol européendepuis l'époque du fascisme et du nazisme. Mais il y a autre chose : les classes dominantes se révèlent incapables de contrôler leur crise. Éclairant, le spectacle des attaques mutuelles entre anglais et français après l'échec du Sommet européen (vice-éditeur du Daily Telegraph, Jeremy Warner, a publié un postdont le titre était « le seul problème avec la France, c'est qu'elle est pleine de français »). Devant le désastre annoncé, tout le monde se défausse de ses responsabilités. Le « père de l'Europe » Jacques Delors dit désormais que « l'euro était condamné dès le début ». Même le chef d'Etat major des États-Unis, le général Dempsey, déclare que la « zone euro est en grand danger » et que les États-Unis sont « très préoccupés (…) de la possibilité d'émeutes dans les rues et de désintégration de l'Union ». Dans ce contexte, le ministre des Affaires étrangères Alain Juppé a tenté d'apaiser les relations franco-anglaises, en soulignant les convergences dans « le traitement de la crise en Libye, en Iran et en Syrie », en annonçant un sommet militaire bi-latéral, en rapelant les avancées dans la « création d'un drone commun »et d'un « programme commun de simulation d'armes nucléaires », domaine touchant au « cœur du cœur de la souveraineté nationale ». Cette même souveraineté nationale que le président de l'UE, Van Rompuy, déclare qu'il « faudra sacrifier pour retrouver une nouvelle zone euro crédible ». Vous y voyez une contradiction ? Pas le moins du monde. Ce qu'il faut, c'est avoir les bonnes lunettes pour voir la réalité de l'Union européenne du grand capital.
Article initial de Jorge Cadima, du département international du PC Portugais (PCP), pour Avante, organe du PCP
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire