Nous commémorerons ainsi à la même occasion le cinquantenaire de l’assassinat à Genève de Félix Moumié. Pour mémoire, c’est le 3 novembre 1960 que l’illustre nationaliste camerounais est empoisonné au thallium, lors d’une soirée au Restaurant le Plat d’Argent au cœur de la Vieille-ville de Genève, par un agent secret français qui se disait journaliste.
La journée du 13 novembre commencera, comme tous les ans, par un hommage vibrant au patriote Félix Moumié au bas des marches du lieu où se trouvait le Plat d’Argent, à la Grand-Rue 4. Nous ne manquerons pas de penser à notre cher et regretté Pius Njawé, qui était avec nous en 2009 dans les mêmes circonstances, et qui avait si bien fait le lien entre la lutte de Moumié en 1960 avec celle qui doit se pérenniser jusqu’à la véritable libération de l’Afrique.
En passant par une visite d’hommage au Pavillon de l’Hôpital cantonal qui vit les dernières heures de Félix Moumié, nous nous retrouverons à 17h00 dans la salle qui nous accueillera pour ces cérémonies de remise du Prix Moumié.
A travers la qualité des personnes qui ont répondu à notre invitation, autant les lauréats, les représentants des lauréats à titre posthume, ainsi que les orateurs dans le cadre de la Conférence internationale, nous comptons marquer cet événement de manière mémorable.
C’est ainsi que nous accueillons le Roi traditionnel Bamiléké Na-Tche-Ma - Tchendjou II Sokoudjou Rameau Jean Philippe, Fo’o de Bamendjou, intronisé en 1953, 15ème chef de la dynastie et doyen des chefs traditionnels de la région de l'Ouest, qui sera accompagné de sa cour, avec la collaboration logistique des communautés Bamendjou de Suisse et de France. En tant que témoin et victime de la répression coloniale et post-coloniale, il a notamment assisté à l’exécution d’Ernest Ouandié le 15 janvier 1971 à Bafoussam. Elevé en pays Béti jusqu’à son intronisation, victime en tant que Chef traditionnel de tentatives incessantes de corruption et de persécutions de représailles par le pouvoir, ce vétéran de la lutte contre le tribalisme, instrument politique de division monté de toute pièce, a toujours prôné la neutralité pour symboliser l’unité et la réconciliation pour un Cameroun souverain et prospère.
Mme Margaret Nain, veuve du regretté et grand résistant camerounais Albert Mukong, fera personnellement le déplacement de Genève, pour recevoir le Prix attribué à son illustre époux, qui s’est éteint en 1984 chez lui à Bamenda. Résistant farouche, vétéran de la lutte contre la violation des droits de l’homme en tout genre, il fut militant nationaliste de sa jeunesse jusqu’à sa mort. Au crépuscule de sa vie, fatigué et déçu du manque total de volonté du pouvoir, qui ignore jusqu’à ce jour avec une immense arrogance les doléances et revendications de la communauté anglophone, Albert Mukong s’était résolu à embrasser la cause de l’indépendance du Cameroun anglophone. Les Camerounais se rappelleront toujours de la ténacité et de la rare détermination de ce grand homme. Après avoir passé plusieurs années dans des camps de concentration, il fut libéré grâce à la pression internationale, gagnant le procès qu’il avait intenté contre un régime camerounais oppressif à outrance. La présence à Genève aux côtés du Roi Sokoudjou, de sa veuve, soutien inconditionnel pendant de nombreuses années de tortures et de tourments, est considérée par les organisateurs de cet événement historique, comme un symbole du rapprochement entre les peuples, ainsi que d’un vibrant appel au dialogue national.
Nous accueillons également le journaliste camerounais Jean-Bosco Talla, Directeur de l’hebdomadaire « Germinal », et figure symbolique de la lutte contre les violations du droit d’expression au Cameroun et en Afrique. S’illustrant comme la mauvaise conscience du régime, M. Talla continue inlassablement ses dénonciations contre une corruption rampante, et défie en permanence l’illégitimité et les abus de la classe dirigeante. Son opiniâtreté à toute épreuve fait de lui une cible privilégiée des services de renseignements, et un habitué des interpellations et séjours en prison. C’est ainsi que dans la perspective des élections dans différents pays en 2011, dont le Cameroun, le Centrafrique et le Tchad, les journalistes africains subissent de manière exponentielle les assauts soutenus de leurs gouvernements respectifs qui veulent les empêcher de témoigner de leurs dérives contre leurs peuples qui les ont « librement et démocratiquement » élus.
Last but not least, Mme Euphrasie Feu Goungaye Wanfiyo, nous fait également l’honneur infini de venir recevoir le Prix décerné à son époux, dont la brutale disparition en décembre 2007 en Centrafrique près de Bangui, ressemble à tous points de vue à un règlement de compte politique. En effet, Maitre Goungaye travaillait activement avec la Cour Pénale Internationale pour la réhabilitation de milliers de victimes de sévices et massacres en République Centrafricaine dans les années 2002 et 2003. Mme Goungaye sera accompagnée d’une délégation centrafricaine, et présentera les activités de la Commission Vérité et Justice, association créée en France à la suite de la mort de son mari, ayant pour but de pérenniser l’œuvre et la mémoire de ce patriote centrafricain mort sur le champ de bataille, en pleine défense des Sans Voix. Ce prix Moumié attribué à Maître Goungaye se doit aussi de rappeler au monde, qu’aujourd’hui, autant qu’en 1960, l’assassinat politique reste en Afrique une arme impitoyable pour ceux qui pensent ainsi effacer les obstacles ainsi que leur mauvaise confiance, pour mieux s’accrocher au pouvoir et à leur butin.
La Conférence internationale qui suivra la remise du Prix, évoluera autour du thème du Déficit démocratique en Afrique centrale et le risque d’implosion sociale. Nous aurons donc l’immense plaisir d’accueillir le Professeur Rigobert Bwemba-Bong, géopolitologue camerounais, Anatole Malu, d’origine congolaise et Président de l’Université africaine de Genève, Acheikh Ibn Oumar, tchadien, ancien ministre des Affaires Etrangères et dans l’opposition depuis plusieurs années, ainsi que le Professeur Betina Begong-Bodoli, homme de lettres centrafricain et fondateur du Mouvement Panafricain – MPA. Ces quatre illustres intervenants nous brosseront de manière très complémentaire, un tableau de la situation actuelle en Afrique centrale particulièrement, soutenant la nécessité de s’unir dans un esprit de dénominateur commun panafricaniste en ce cinquantième anniversaire de ce que les prédateurs de l’Afrique appellent les « indépendances africaines ».
Pour compléter ce tableau, l’intellectuel camerounais Shanda Tonmé, personne ressource de la Fondation Moumié, spécialiste des Relations Internationales et redoutable défenseur des opprimés au Cameroun, viendra apporter une touche supplémentaire à l’événement.
C’est donc dans le panache et à travers une immersion complète dans des questions brûlantes d’actualité, que nous comptons écrire une page de l’histoire du Cameroun et de l’Afrique. Nous nous réjouissons de partager cette grande joie avec tous les Camerounais, Africains et amis de l’Afrique, animés par un désir irrépressible de retrouver une Afrique véritablement émancipée et maîtresse de son destin.
Rebecca Tickle
Secrétaire-générale
Fondation Moumié
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