Pierre LISE président du cercle des originaires de l'Outre-Mer répond à un questionnaire proposé par Tony MARDAYE
I. – Pourquoi organiser un colloque ayant pour thème «Outre-mer et devise républicaine»?
L'un des objectifs premier de l'association est de faire évoluer le regard porté sur les ressortissants de l'outre-mer en fournissant la démonstration, par des exemples concrets rendus publics et diffusés avec l’Annuaire des personnalités ultramarines en métropole, qu'ils ne sont pas assignés de toute éternité à des rôles accessoires et subalternes au sein de notre société.
Cependant la présence, dans maints domaines, d'ultramarins à des fonctions de responsabilité ne doit pas occulter un autre constat: leur nombre demeure limité, leur progression étant entravée par des freins qu'il faut s'attacher à lever.
Ainsi, notamment dans la fonction publique, des plafonds de verre restent-ils à briser. Il s'agit là du deuxième axe d'action que se donne l'association.
Pour agir, il nous a semblé pertinent de nous interroger préalablement sur les raisons qui font que pareille situation perdure alors même que «La République reconnaît au sein du peuple français, les populations d’outre-mer, dans un idéal commun de liberté, d’égalité et de fraternité».
En quoi la devise républicaine est-elle défaillante? Pourquoi l’idéal n’est pas atteint ?
L’Outre-mer et les ultramarins sont-ils institutionnellement placés dans une situation similaire au regard des trois piliers de la devise?
Leur spécificité, notamment géographique, est-elle intégrée dans les dispositifs élaborés pour assurer précisément un traitement équivalent?
Si l’on peut supposer que les libertés publiques fondamentales sont assurées de la même façon, qu’en est-il de la liberté d’entreprendre, de progresser à travers ses études et sur le plan professionnel.
Par quels moyens l’égalité est-elle assurée ? Quels sont les moyens mis en œuvre pour rendre effective l’égalité des chances ?
Quant à la fraternité, y a-t-il des processus mis en œuvre pour la faire exister et vivre pleinement? La métropole entretient-elle avec ses outre-mer des relations privilégiées d’échanges qui conduisent à se fréquenter, à mieux se connaître, s’apprécier? Favorise t-on concrètement et réellement la reconnaissance d’une égale dignité et non pas de simples, très insuffisantes et même perverses, bienveillance ou tolérance ?
Il y a donc matière à conduire une première approche qui consiste à identifier ce qui est prévu dans ces directions par l’arsenal juridique, institutionnel et administratif et à analyser la pertinence de ces constructions.
Puis, à la suite d’Alexis de Tocqueville qui voyait sa patrie comme «un pays où les règles de droit sont rigides et leur application molle», il faut examiner l’application qui est faite de ces principes, leur effectivité.
Au-delà, il restera à imaginer comment refaire de la devise le sésame d’une société fraternelle, équitable et libre.
II.- Sur quoi portera concrètement la discussion?
La devise a connu maints avatars, invoquée pour la première fois sous la Révolution française, rejetée, réadmise en 1848, boudée sous le Second Empire, réinscrite sur les frontons des édifices publics pour la célébration du 14 juillet 1880, elle figure dans les constitutions des 27 octobre 1946 et 4 octobre 1958.
À l’égard de l’outre-mer, c’est par un amendement n° 188, au début du texte proposé pour l’article 72-3 de la Constitution (dans sa révision du 28 mars 2003), qu’a été inséré l’alinéa premier suivant: «La République reconnaît au sein du peuple français, les populations d’outre-mer, dans un idéal commun de liberté, d’égalité et de fraternité».
Le colloque vise donc à se demander: pourquoi la nécessité de cette affirmation? Pourquoi si tard? Pourquoi seulement comme un idéal?
Il s’agira ainsi d’analyser les points suivants:
- Pour chacun des trois piliers de la devise, quel est l’état du droit positif dans les relations des outre-mer et de la métropole?
- Quel est l’impact sur la réalité, le vécu, le ressenti des ultramarins et des métropolitains?
- Comment progresser concrètement dans l’atteinte des objectifs portés par la devise?
III.- Comment s’organisera la journée du colloque?
Cette journée, 29 avril 2011, est un temps fort de la vie de notre jeune association et est marquée en fait par deux manifestations.
D’abord, cette journée consacrée au colloque proprement dit se déroulant de 9 heures à 17 heures. Puis, à partir de 18 heures, sera officialisée la parution de l’Annuaire des personnalités ultramarines résidant en métropole.
En premier lieu, le programme du colloque comporte l’examen de chacun des termes de notre devise ternaire. Pour chacun de ces piliers, trois exposés déclineront les éléments que pose le concept appliqué à l’outre-mer.
Dans la matinée, après l’allocution de bienvenue de M. Serge LARCHER, suivie de la présentation du colloque par Ferdinand MELIN-SOUCRAMANIEN et moi-même, la première intervention, intitulée «L’outre-mer dans la République», sera celle de M. Bernard STIRN, Président de la section du contentieux du Conseil d’Etat, qui nous fait l’honneur de sa parfaite maîtrise juridique du sujet.
Suivront alors autour du thème de la liberté les analyses sur «De la libération à la liberté», «La conquête des libertés», «Les libertés fondamentales au cœur du pacte républicain». Cette matinée s’achèvera par un déjeuner-buffet, salle René Coty, qui permettra des contacts et échanges conviviaux.
À 14 heures, lors de la reprise des travaux, le second volet, celui de l’égalité, permettra d’approfondir les problématiques liées, d’abord aux discriminations résiduelles, puis aux discriminations positives, enfin à la différenciation statutaire.
À 15h 30, pause et débat ayant eu lieu, le dernier triptyque, celui de la fraternité, conduira à s’interroger sur «L’éducation, ciment de la fraternité», ensuite sur «Quels chemins pour la fraternité?», puis sur «L’exigence de solidarité nationale».
Après la discussion avec la salle, un rapport de synthèse sera présenté à l’auditoire.
La journée ne sera pas pour autant achevée. Elle se poursuivra au Ministère chargé de l’outre-mer, rue Oudinot.
En effet, sous la présidence de Mme Marie-Luce PENCHARD, ministre chargée de l’outre-mer, se déroulera à 18 heures, salles Léon Delgrès de l’hôtel ministériel, une cérémonie dédiée à la parution de la première édition de l’Annuaire des personnalités ultramarines en métropole. Ce support bénéficie d’une Préface de Madame la ministre.
Cet ouvrage, qui comporte 160 biographies, constitue la mise en œuvre d’une très ancienne idée, vieille de plus de 40 ans. Sa concrétisation est étroitement liée à la vocation de l’association qui est de promouvoir l'image des ultramarins et d’en faciliter les parcours professionnels.
IV.- Quels sont les bénéfices et les retombées escomptées ou espérées de ce colloque?
Tout d’abord, pour les organisateurs et les intervenants, nous espérons une participation avec un public contribuant par les questions à un échange fructueux. La réalisation et la diffusion des actes du colloque constitueront un prolongement recherché. Le relais médiatique des problématiques soulevées est aussi espéré.
Ensuite, par la qualité des analyses faites, il s’agit, dans le cadre de 2011 année des outre-mer français et par delà, d’œuvrer pour la reconnaissance de l’existence de responsables, de professionnels, d’experts, de jeunes talents contribuant à la richesse du pays.
Enfin, à l’instar de la poursuite des travaux de la Mission d’information commune sur la situation des D.O.M, du suivi de la mise en œuvre des mesures décidées lors du premier CIOM du 6 décembre 2009, les conclusions du colloque seront prises en compte dans les réflexions conduites par les commissions mises en place au sein du Cercle pour l’excellence des originaires d’Outre-Mer. Elles doivent aboutir à des propositions concrètes qui seront transmises aux autorités ministérielles et aux parlementaires s’intéressant à l’outre-mer.
Très concrètement, les pistes de réflexions qui auront émergées viendront préparer et alimenter le colloque prévu par le Cercle en fin d’année sur le thème «Outre-mer et ascenseur social».
Cercle pour l'excellence des originaires
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