mercredi 3 août 2011

Haïti-Politique : 16 sénateurs ont voté contre le choix de Bernard Gousse comme futur chef de gouvernement


Le groupe des 16 sénateurs (sur 30, le total au grand corps en Haïti), qui avaient annoncé leur décision “politique” de rejeter le deuxième choix du président Michel Joseph Martelly, a voté contre la désignation de Bernard Honorat Gousse comme futur premier ministre d’Haïti, tard dans la soirée du mardi 02 août 2011, a observé l’agence en ligne AlterPresse.

Le vote a eu lieu au terme de plus de 7 heures de débats, parfois houleux, entre sénateurs qui voulaient juger de la recevabilité ou non du rapport de la commission spéciale, ayant étudié les pièces soumises par le deuxième candidat de Martelly (après Daniel Gérard Rouzier) pour devenir chef de gouvernement du nouveau président, et collègues sénateurs qui s’étaient déjà positionnés contre Gousse.
C’est presque dans une atmosphère de cafouillage que la séance du vote a été rapidement levée (vers 10:00 pm locales, c’est-à-dire 3:00 gmt le mercredi 3 août 2011) par le président du grand corps, le sénateur Jean Rodolph Joazil (Nord-Est), sans aucun mot sur la suite qui allait être prise à la décision du 2 août 2011 au sénat de la république.

Il n’y a eu ni votes favorables, ni votes d’abstention.
Le sénateur Joazil a consulté l’assemblée des sénateurs, non pas sur le rapport de la commission spéciale quant au dossier de pièces du premier ministre désigné Bernard Honorat Gousse, mais sur leur approbation ou non du choix effectué par Martelly.

Seulement les 16 sénateurs, membres du groupe parlementaire pour le renouveau (Gpr, rassemblant les élus de la plateforme “Inite” et alliés), dont le vote défavorable contre Gousse [ancien ministre de la justice et de la sécurité publique sous le gouvernement provisoire, de 2004 à 2006] était acquis, ont levé la main pour signifier leur position préalablement arrêtée.

Vote “technique” ou “politique” ?

Pendant plusieurs heures, les sénateurs, qui ne font pas partie du Gpr, ont tenté d’analyser, sur la forme, le rapport de la commission spéciale de 9 membres, lequel a souligné la conformité des pièces du postulant-premier ministre dans 5 cas, excepté en ce qui concerne son certificat de décharge.

Tout en déclarant “controversée” la décharge donnée à Gousse par l’ancien président provisoire Boniface Alexandre sur la base d’un décret daté de 1983 (contraire aux prescrits de la Constitution de 1987, confiant cette responsabilité à une commission bicamérale du parlement), la commission ad hoc évoque une présomption “de bonne gestion” de Gousse en référence au rapport favorable de la cour supérieure des comptes et du contentieux administratif (Cscca).
Les débats du 2 août 2011 au sénat de la république ont été dirigés sur le caractère “technique” du vote à imprimer autour du choix, fait par un président, d’une personnalité appelée à assumer la charge de chef (ou cheffe) de gouvernement.

Le vote politique, s’il devait y avoir lieu, doit se dérouler au moment de la ratification de la déclaration de la politique générale du 1er ministre désigné, ont argué les sénateurs en désaccord avec le groupe des 16 (Gpr et alliés).
Parallèlement, les sénateurs en désaccord avec le groupe des 16, à l’exemple des sénateurs Andris Riché (Grande Anse / Sud-Ouest), Youri Latortue (Artibonite / Nord) et François Annick Joseph (Artibonite / Nord), ont beaucoup insisté sur l’absence de “recommandations” produites par la commission spéciale, contrairement aux règlements internes du sénat.

Invité à trancher sur ce manquement, au terme des règlements intérieurs, le sénateur Joazil (qui, en tant que président, n’a pas voté, malgré son appartenance au Gpr) s’est plutôt prononcé pour la continuation de la séance, au lieu de renvoyer le rapport à la commission spéciale pour y ajouter les recommandations.
“Je ne dis pas que le rapport soit incomplet, mais il manque les recommandations”, a précisé Latortue.

Au lieu de 22 (au ministère de l’intérieur et des collectivités territoriales / Mict), il y a eu environ 60 anciens parlementaires à bénéficier de postes de “consultants” dans plusieurs ministères (comme celui de l’éducation nationale et de la formation professionnelle / Menfp), dont les salaires mensuels (par consultant) de 100 mille gourdes (US $ 1.00 = 41.00 ; 1 euro = 61.00 gourdes) ont servi à financer la campagne électorale de ces différentes personnalités aux dernières compétitions électorales, a dénoncé Youri Latortue.

Des sénateurs du groupe des 16, comme le chef de file Joseph Lambert (Sud-Est) et Moïse Jean-Charles (Nord), ont fait peu de cas des différentes mises en garde de leurs collègues (minoritaires à l’assemblée) quant aux conséquences de ce deuxième rejet (du choix de Martelly) sur : leur éventuelle réélection auprès de leurs mandants, les nombreux défis (sécurité publique, épidémie de choléra, questions environnementales, etc.) qui attendent la prochaine équipe gouvernementale, l’imminence du passage du cyclone “Emily” (prévu pour le mercredi 3 août 2011 sur Haïti).

A leur avis, les débats, entamés par leurs collègues, qui ont avancé de multiples arguments (les uns plus subtils que les autres), n’ont aucune chance d’aboutir, ni de les porter à démordre de leur position initiale, leur conviction étant assurée sur Bernard Gousse.

Voilà pourquoi, les 16 sénateurs (Gpr et alliés) ont demandé au président Martelly de désigner une autre personnalité à la place de Bernard Honorat Gousse, dans le but de faire gagner du temps au pays dans la nomination du prochain gouvernement, ont-ils rappelé.

Et Martelly et Gousse savaient pertinemment que l’ancien ministre de la justice et de la sécurité publique ne pouvait point obtenir les faveurs des 16 sénateurs, a révélé le sénateur Jean-Charles évoquant une réunion secrète entre les différents protagonistes et mentionnant une volonté de désistement de Gousse à briguer le poste de chef de gouvernement.

Sans surprise, Martelly, qui avait indiqué disposer des faveurs de 18 sénateurs, devra désigner une troisième personnalité comme candidate au poste de chef / cheffe de gouvernement.

Après avoir prêté serment, le samedi 14 mai 2011, comme nouveau chef d’État d’Haïti, Michel Joseph Martelly atteindra-t-il les 90 ou 100 premiers jours (14 ou 24 août 2011) sans avoir pu négocier véritablement avec les forces politiques au parlement afin de former un nouveau gouvernement avant la fin de l’exercice fiscal 2010-2011 et la rentrée des classes de septembre 2011 ?

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